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306                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                       bou, le pêcher à fleurs. Le paon caractérisé par les '  ges, les céramographes, sont loin d’être d’ac­
                       yeux de sa queue traînante, un autre oiseau voisin   cord. Tel auteur, très-compétent, dit que
                        de l’argus remplacent ordinairement et habituel­
                       lement le fong-homg (I). Le dragon sacré est assez   la porcelaine de Perse et la porcelaine
                       rare, et la grue peu commune, en d’autres termes   hindoue sont deux chimères, qui n’ont ja­
                       les animaux symboliques sont presque exception­  mais existé que dans la tête de quelques
                       nels (2). »
                                                                  écrivains. Cependant Alexandre Brongniart
                                                                  est très-affirmatif sur cette question. Il s’ex­
                          Voilà les principaux caractères de la por­
                        celaine coréenne bien définis, et nous    prime en ces termes :
                       donnons comme spécimen (fig. 222), un vase
                                                                   « Quoique je n’aie pu ni voir ni connaître per­
                       coréen.
                                                                  sonne qui ait vu de vraie porcelaine de Perse
                         Beaucoup de pièces en porcelaine de      (toutes les sortes de poteries qu’on m’a citées pour
                       Corée sont ornées du Kir imon japonais, c’est-   telles se réduisent, par l’examen, à n’être que de
                                                                  belles faïences en émail bleu), on ne peut guère dou­
                       à-dire des deux armoiries du Mikado. On voit
                                                                  ter qu’on n’ait fabriqué de la porcelaine en Perse.
                       partout, au Japon, ces armoiries qui re­   Ce ne sont pas les indications vagues que Pallas en
                       présentent l’insigne officiel, la marque du   donne sur des fragments de poterie qu’il appelle
                       pouvoir : on les trouve sur la monnaie et   porcelaine, trouvés dans des mines et dans des tu-
                                                                  mulus, qui peuvent établir cette conviction, car il y
                       jusque sur les gâteaux que l’on sert dans
                                                                  a eu un temps où on appela porcelaines toutes les po­
                       les repas d’étiquette offerts aux ambassa­  teries un peu remarquables. Mais ce que dit Chardin
                       deurs.                                     ne peut laisser douter que les pièces de poterie per­
                                                                  sanes qu’il donne comme porcelaine n’appartiennent
                                                                  réellement à cette sorte de poterie. 11 la décrit sous
                         Nous ne nous arrêterons pa's sur la porce­
                                                                  le nom de vaisselle d’émail ou de faïence. « On en
                       laine des Indes. D’après quelques auteurs,   « fait, dit-il, dans toute la Perse. La plus belle se fait
                       elle ne consiste qu’en chefs-d’œuvre, et d’a­  « à Chiras, àMetched, à Yesd, à Kirman en Carama-
                                                                  « nie, particulièrement dans un bourg nommé Zo-
                       près d’autres elle n’aurait jamais existé. On
                                                                  « rende. La terre de cette faïence est d’émail pur,
                       voit dans quelques musées de magnifiques   « tant en dedans qu’en dehors (ce qui indique le
                       échantillons de la porcelaine de l’Inde ; i  « glacé de la couverte) comme la porcelaine de la
                       mais l’authenticité des vases et des soucou­  « Chine. Elle a le grain aussi fin et est aussi trans-
                                                                  « parente, etc. » 11 n’est pas nécessaire d’aller plus
                       pes présentés comme provenant de fabriques
                                                                  loin pour voir que ce n’est pas une faïence; ce ne
                       hindoues, est révoquée en doute. On pré­   peut être non plus un verre translucide, car on ne
                       tend que ces vases et ces soucoupes ont été   connaît aucune vitrification de ce genre venant de
                       commandés aux fabriques de la Chine, du    la Perse, et d’ailleurs ce voyageur dit si expressément
                                                                  que cette porcelaine est tellement semblable à celle
                       Japon et de la Corée, avec des légendes se   delà Chine que souvent on ne peut pas l’en distin­
                       rapportant aux possesseurs indiens.On ajoute   guer, qu’il faudrait le croire observateur bien super­
                       qu’il n’y a jamais eu de fabrication propre­  ficiel pour avoir confondu deux produits aussi dis­
                                                                 semblables en tout que de la porcelaine et du verre.
                       ment dite sur les bords du Gange ni de
                                                                  11 n'est pas probable non plus que cesoit de véritable
                       l’Indus.                                  porcelaine chinoise apportée par le commerce, puis­
                         La porcelaine a-t-elle été fabriquée en   que Chardin cite les principaux et nombreux en­
                                                                  droits où on la fabrique. Ainsi, en 1650, époque du
                       Perse? Adhùc sub judice lis est, et les ju-
                                                                  voyage de Chardin, et très-certainement avant cette
                                                                  époque, on fabriquait de la porcelaine dans cette
                         (1) « Le fong-hoang sacré des Chinois est un oiseau sin­
                       gulier et immortel qui demeure au plus haut des airs et   partie de l’Asie (1). »
                       ne se rapproche des hommes que pour leur annoncer les
                       événements heureux et les règnes prospères. Sa tête ornée   M. Marryat, dans son Histoire des poteries,
                       de caroncules (éminences charnues), son col entouré de
                       plumes soyeuses, sa queue tenant de celles de l’argus et du   faïences et porcelaines, s’arrête à un mezzo-
                       paon, le font facilement reconnaître. »    termirie.
                         (2) Histoire de la porcelaine par Jacquemart et Le Blanc,
                       1 vol. in-4. Paris, 1862.                   (1) Traité des arts céramiques, t. Il, p. 48i.
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