Page 299 - Les merveilles de l'industrie T1
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294                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                       et reconnut qu’ilss’y adaptaient avec une admirable   stance fut introduite en Europe par les Por­
                       précision. Thang lui demanda alors d’où venaitcette
                                                                 tugais, entre les années 1508 et 1518. Le fait
                       pièce remarquable. « Anciennement, lui dit Tcheou,
                       vous ayant demandé la permission d’examiner votre   est exact, si l’on parle de l’introduction
                       trépied à loisir, j’en ai pris avec la main toutes les   commerciale, c’est-à-dire de l’importation
                       dimensions; je vous proteste que c’est une imitation   de cette matière comme article de négoce;
                       du vôtre ; je ne voudrais pas vous en imposer. »
                         <( Le Thai-tch’ang, convaincu de la vérité de ces   mais des porcelaines isolées avaient déjà
                       paroles, acheta au prix de quarante onces d’argent   pénétré en Europe et ailleurs, longtemps
                       (300 fr.), ce trépied qui faisait son admiration et le   avant le xvie siècle.
                       plaça dans son musée, à côté du premier, comme
                       si c’eût été un double.                     Un écrivain arabe, Soliman, fait mention
                         « On rapporte que quelques années plus tard un   de la porcelaine chinoise dès l’année 851.
                       collectionneur nommé Thou se prit à convoiter l'an­  Dans un ouvrage intitulé Impressions de
                       cien trépied au point de ne plus penser à autre
                       chose ni jour ni nuit. A force de supplications, il   voyages dans l’Inde et dans la Chine, Soli­
                       finit par obtenir au prix de mille onces d’argent,   man s’exprime ainsi :
                       (7,500 fr.) le trépied imité tant convoité, puis il re­
                       tourna plein de joie dans sa ville natale. »  « On trouve en Chine une argile excessivement
                                                                 fine, dont on confectionne des vases qui ont la trans­
                         Pour compléter l’histoire des progrès de
                                                                 parence du verre, On peut voir à travers l’eau le
                       l'industrie céramique chinoise, nous di­  vase qui est fait de cette argile. »
                       rons que la période Tching-te du calen­
                      drier chinois (1506-1521) fut marquée par    On sait, d’ailleurs, qu’avant la fin du
                      un événement important pour l’art de la    vinesiècle, les Arabes avaient créé jusqu’en
                      décoration. Nous voulons parler de l’intro­  Chine des établissements commerciaux.
                      duction du bleu de cobalt, que le gouverne­  L’extension des établissements arabes en
                      ment de la province du Yun-nan avait       Chine fut même si grande que, vers le mi­
                      acheté à des marchands étrangers. Ce bleu   lieu du ixe siècle, il y avait à Canton un cadi
                      de cobalt, qui, à poids égal, coûtait deux   arabe, pour rendre la justice à ses natio­
                      fois plus cher que l’or, fournissait d’admira­  naux. Ce n’est donc pas trop s’aventurer que
                      bles tons bleus pour la peinture sur por­  de soutenir que la porcelaine chinoise de­
                      celaine. C’est pour cette raison que les   vait être connue des Arabes dès la fin du
                      porcelaines à fleurs bleues de la période   vme siècle.
                      Tching-te sont, pour la plupart, d’une ex­   Parmi Les présents que Saladin, le héros
                      quise beauté.                             musulman de la troisième croisade, envoya
                                                                en 1171, à Noureddin, calife de Syrie, on
                                                                vit figurer un service de porcelaine chinoise,
                                                                composé de quarante pièces.
                                                                  Marco Polo, le premier voyageur eu­
                                 CHAPITRE XXIII
                                                                ropéen qui ait pénétré en Chine, y sé-
                      INTRODUCTION COMMERCIALE DE LA PORCELAINE DE LA CHINE  l journa vingt-six ans. Lorsqu’il fut revenu,
                        EN ARABIE ET EN EUROPE. —SINGULIÈRES FABLES ACCEP­
                                                                en 1295, à Venise, son pays natal, il pu­
                        TÉES EN EUROPE TOUCHANT LA COMPOSITION DE LA POR­
                                                                blia une relation de ses voyages qui fit
                        CELAINE ET SES PROPRIÉTÉS.— IMPORTANCE QU’ACQUIERT
                                                                une sensation immense en Europe. On
                        RAPIDEMENT LE COMMERCE DE LA PORCELAINE EN EUROPE.
                        — LE PÈRE d’eNTBECOI.LES. — DESCRIPTION DE LA VILLE   n’accueillit pourtant ses récits qu’avec une
                        DE K1NG-TE-TCHING. — DÉCADENCE ACTUELLE DE LA FA­
                                                                certaine incrédulité. On le surnommait
                        BRICATION DE LA PORCELAINE EN CHINE.
                                                                Marco Milioni. On reconnut plus tard que
                        On trouve dans la plupart des ouvra­    Marco Polo n’avait rien exagéré en par­
                      ges relatifs à la porcelaine, que cette sub­  lant des richesses de l’empire du Milieu.
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