Page 245 - Les merveilles de l'industrie T1
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240                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                  le dit un auteur italien, Fabio Ferrari. Le   d'Yéna qui était le principal centre de la
                  Dante n’a-t-il pas écrit au xv' siècle :  fabrication de l’île de Majorque. D’autres fa­
                                                            briques existaient dans les îles Baléares, et
                       Tra l’isola di Cipri e di Majolica ?
                                                            principalement dans l’île d’Iviça.
                    Ce furent des ouvriers arabes ou espa­
                  gnols qui importèrent dans les îles Baléares,   Nous allons suivre, dans les chapitres sui­
                  et d’abord à Majorque, la fabrication de la   vants, les progrès considérables que fit en
                  faïence à émail stannifère. Cette fabrication   Italie, et dans d’autres contrées, la fabrica­
                  y prit bientôt un grand développement. Son   tion de la faïence, qui est originaire, comme
                  importance est attestée par des auteurs du   on vient de le voir, de l’Espagne mauresque.
                  xve et du xvi” siècle. Ces auteurs parlent ;
                  même de certains vases nommés bacini,
                  dont la fabrication remonterait aux premiè­
                  res années du xive siècle.                             CHAPITRE XV
                    Ce qui est certain, c’est que l’auteur du
                  Traité de commerce et de navigation, écrit en   ORIGINE Dü MOT FAÏENCE : FAENZA, VILLE d’iTALIE, ET
                                                              FAÏENCE, BOURG FRANÇAIS. — LA FAÏENCE FINE AU
                  1442, parlant des différents objets qui se   TEMPS DE HENRI II.—PROBLÈME PROPOSÉ AUX ARCHÉO­
                  fabriquaient à Majorque et à Minorque,      LOGUES. — RENAISSANCE DE LA CÉRAMIQUE EN ITALIE.
                                                              — les bacini. — lucca della robbia et sa famille.
                  mentionne la faïence, qui trouvait alors un
                                                              — GIROLAMO DELLA ROBBIA ET LE CHATEAU DE MADRID.
                  très-grand débit en Italie.
                    Scaliger, qui écrivait dans la première    Nous avons donné l’explication du nom
                  moitié du xvie siècle, à l’époque où l’on   de majolique donné aux faïences. C’est une
                  commença à connaître en Europe la porce­   véritable bizarrerie que ce nom de ma­
                  laine de la Chine, dit :                  jolique, qui provient du nom d’une des îles
                                                             Baléares, ait surtout été employé en Italie,
                    « On admire l’art avec lequel cette belle porce­
                                                             et que le mot faïence, qui est d’origine ita­
                  laine est imitée dans les îles Baléares, de telle sorte
                  qu’il est difficile de distinguer les vraies des fausses.   lienne, ait prévalu dans le reste de l’Eu­
                  Les imitations des îles Baléares ne leur sont infé­  rope.
                  rieures ni pour la forme ni pour l’éclat, elles les '
                  surpassent même pour l’élégance... »         Le mot de faïence est la traduction fran­
                                                             çaise du nom de Faenza, petite ville de la Ro-
                    Scaliger commet une erreur en compa- :  magne, où l’on fabriquait, à l’époque de la Re­
                  rant la faïence, poterie opaque et tendre, à I  naissance, de nombreuses majoliques en pote­
                  la porcelaine, qui a pour caractère distinctif   ries à vernis stannifère, qui se distinguaient
                  la dureté et la translucidité ; mais il ne res­  par leur élégance et le brillant de leurs cou­
                  sort pas moins de ses expressions laudatives,   leurs, et qui firent, les premières, connaître
                  que les faïences des îles Baléares devaient   en France, ce nouveau produit céramique.
                  être très-estimées à l’époque où il écrivait.  Ceci va nous donner l’occasion de rele­
                    L’hôtel de Cluny possède un plat à reflets   ver, en passant, une erreur assez répandue.
                  métalliques rouges. Dans un double cercle   Près de Fréjus, dans le Var, il existe un
                  qui circonscrit le fond et le bord de ce plat,   bourg, Fayence, où, d’après l’historien Me-
                  se trouve une inscription en caractères illi­  zerai, plusieurs fabriques de poterie émaillée
                  sibles, mais qui sont gothiques et arabes.   ont été en activité dès l’année 1592. On
                  Au centre, on voit les armes de la ville   a conclu de là que le mot faïence pro­
                  d’Yéna, située à quelques lieues de Palma,   venait du nom de ce bourg. Cependant, dit
                  capitale de l’île de Majorque. C’est la ville   M. Demmin, personne ne connaît au jour-
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