Page 158 - Les merveilles de l'industrie T1
P. 158

LE VERRE ET LE CRISTAL.                               153
 152  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
           retrouvons les débris pétrifiés dans le sein de la   « Silicatisation. — M. Kuhlmann en observant la
 appliquant sur les vitres. Le sulfate de ba­  pression de 5 ou 6 atmosphères, dans une   terre, ont, dans les exposés de M. Kuhlmann, une   grande affinité de la chaux pour la silice, sortant à
 ryte, l’outre-mer, l’oxyde de chrome, etc.,   chaudière, la potasse ou la soude caustique   liaison intime et heureuse avec les considérations   l’état naissant de sa combinaison avec la potasse, fut
            plus pratiques concernant la formation de nou­  conduit à étudier également faction des silicates de
 mêlés au silicate de potasse, donnent des   avec des rognons de silice.  veaux ciments, le durcissement des calcaires poreux
 couleurs fixes, semblables aux couleurs demi-   utilisés pour la conservation des monuments, l’ap­
 transparentes des vitraux peints. On peutob-   Nous venons de donner un exposé aussi   plication et la fixation, par le moyen des silicates
            ■alcalins, des couleurs minérales sur les pierres, le
 tenir ainsi, à très-bon marché, une peinture   exact que nous avons pu le faire des
            bois, le verre, les métaux, le papier, les étoffes,
 sur verre, de sorte que cette application spé­  travaux de M. Kuhlmann sur les emplois   etc., la substitution d’une nouvelle base blanche (le
 ciale serait une ressource très-utile pour les   industriels du verre soluble. Cette nouvelle   sulfate de baryte) à la céruse et au blanc de zinc.
            L’on ne sait ce qui doit être le plus loué dans
 églises qui n’ont que peu de ressources.   branche de l’industrie étant marquée au
            11. Kuhlmann, de l’esprit ingénieux et scrutateur ou
 Ajoutons que si l’on passe au feu les vitres   coin du caractère scientifique le plus ac­  de l’esprit persévérant et tenace à poursuivre la
 ainsi recouvertes d’enduits silicatés, on ob­  centué et étant encore peu connue, nous   réalisation de ses idées et la vulgarisation de ses mé­
 tient de très-belles surfaces émaillées. La   croyons utile, en terminant ce chapitre, et   thodes pour lesquelles il n’a pas reculé devant des
            dépenses considérables.
 peinture sur verre pourrait se faire ainsi à   pour compléter l’exposition analytique qui   « Théorie des chaux hydrauliques. — La liqueur
 peu de frais.  précède, de reproduire une partie d’un rap­  des cailloux, silicate de potasse ou silicate de soude,
 Les dissolutions siliceuses ont encore   port qui fut adressé, en 1859, au Ministre de   est la base des nouveaux procédés. Dès l’année 1840,
            des recherches sur l’origine et la nature des efflo­
 servi à M. Kuhlmann pour remplacer l’albu­  l’agriculture et du commerce, par une com­  rescences des murailles avaient donné à M. Kuhl- j
 mine que l’on emploie aujourd’hui pour   mission qui avait M. Dumas pour rapporteur.   mann l’occasion de constater la présence de la po­
 fixer les couleurs dans l’impression des   Les nouvelles applications du verre soluble   tasse et de la soude dans la plupart des calcaires des
            diverses époques géologiques, en plus forte pro­
 étoffes. Pour se servir, dans ce cas, de la dis­  sont exposées dans ce travail avec lucidité.
            portion dans les calcaires hydrauliques que dans
 solution de silicate de potasse, on la mé­  Voici les principaux passages de ce rapport.  les calcaires à chaux grasse. Quelle influence pou­
 lange à la couleur au moment de l’impres­  vaient-ils avoir sur la propriété hydraulique ?
 sion. Quelques jours après, le dessin prend   « La commission chargée par le Ministre de l’a­  M. Kuhlmann pensa que, sous l’influence de la po­
 griculture et du commerce, de lui rendre compte   tasse et de la soude, les calcaires siliceux pouvaient
 une consistance telle que le savonnage aux   donner lieu, par la calcination, à des combinaisons
 des résultats obtenus par M. Kuhlmann, professeur
 alcalis ne l’altère pas.  de chimie à Lille, dans l’application des silicates   doubles de chaux, de silice ou d’alumine et d’un
 M. Kuhlmann a fait encore l’application   alcalins solubles au durcissement des pierres poreu­  alcali, analogues à celles que l’on obtiendrait par la   Fig. 101. — Kuhlmann, de Lille.
 des silicates alcalins à l’apprêtage des fils et   ses, à la peinture, etc., s’est mise en rapport avec   calcination de quelques espèces minérales hydratées,   potasse et de soude sur les pierres calcaires, sur la
 l’inventeur de cet ingénieux procédé. M. Kuhlmann   telles que l’apophyllite, la stilbite, l’analcime ; que
 des tissus de toute nature. Cet apprêt, en   ces combinaisons mises ensuite en contact avec 1 eau   craie en particulier. 11 reconnut tout d’abord que si
 s’est mis lui-méme obligeamment à la disposition de
 meme temps qu’il fournit de la rigidité aux   la commission, pour exposer devant elle les prin­  subissaient une action analogue à celle qui amène   l’on met à froid de la craie en contact avec une dis­
 étoffes, leur donne un caractère d’incom­  cipes théoriques qui l’ont successivement amené à la   la consolidation du plâtre, une hydratation et, par   solution de silicate de potasse, une portion de la
 création d’une nouvelle industrie. 11 lui a ouvert son   suite un durcissement.  craie se transforme en silicéo-carbonate de chaux,
 bustibilité.  « L’effet principal de la potasse et de la soude   tandis qu’une portion correspondante de potasse est
 laboratoire, dans lequel la commission a trouvé la
 réalisation de tous les faits pratiques annoncés par   était de transporter une certaine portion de silice   déplacée ; que la craie durcit peu à peu à l’air, prend
 On voit combien sont grandes et précieuses   l’inventeur, et a pu suivre, pas à pas pour ainsi dire,   sur la chaux et de donner naissance à des silicates   une durée plus grande que celle des meilleurs ci­
                                                       ments hydrauliques, et que, mise en pâte avec le si­
 les propriétés du silicate de potasse. Il nous   les progrès de son idée. M. Kuhlmann lui a ouvert   avides de prendre l’eau pour ne conserver que l’eau
 également les portes de ses usines de la Madeleine et   nécessaire à leur composition d’hydrates et se solidi­  licate, elle a la propriété d’adhérer fortement aux
 reste à dire comment l’inventeur fabrique   fier. De nombreux faits vinrent à l’appui de cette   corps à la surface desquels elle est appliquée. 11
 de Saint-André, près Lille, dans lesquelles la fabri­
 industriellement ce composé.  cation des silicates alcalins et du sulfate de baryte a   théorie. De la chaux grasse mise en contact avec une   avait donc découvert un mastic propre à la restau­
 M. Kuhlmann prépare le verre soluble   pris déjà une extension considérable, qui s’accroît de   dissolution de silicate de potasse se transforme im­  ration des monuments publics, à la fabrication des
 jour en jour ; il lui a fait visiter enfin les divers mo­  médiatement en chaux hydraulique. De la chaux   objets de moulure. Poussant plus loin ses expérien­
 par deux moyens :                                     ces, il constatait que la craie en pierre naturelle,
 numents et les habitations situés à Lille, auxquels la   grasse et du silicate alcalin, pulvérisés très-fin et
 1° Par voie ignée, en chauffant dans un   silicatisation a été appliquée.  mélangés dans la proportion de 11 de silicate sur   plongée dans une dissolution de silicate de potasse,
 creuset, au four à réverbère, du carbonate   « Les faits signalés à la commission, les expérien­  100 de chaux, donnent également une excellente   pouvait absorber une quantité de silice considérable,
                                                       en exposant alternalivement et à plusieurs reprises
             chaux hydraulique. Un mortier de chaux grasse ar-
 de potasse ou de soude et de la silice   ces exécutées devant elle, sont de la plus haute im­  la craie à l’action delà dissolution et à celle de l’air;
 portance pour les sciences, les arts et l’industrie. Les   ' rosé à diverses reprises avec une dissolution de sili­
 réduite en poudre et lavée. Après un   cate alcalin se transforme en mortier hydraulique.   que cette pierre prenait avec le temps une grande
 considérations géologiques de l’ordre le plus élevé
 certain temps de chauffage, le silicate ou   sur la formation des roches, sur la possibilité de re­  Enfin, avec le silicate vitreux et la chaux, l’on peut   dureté à la surface; que le durcissement, d’abord
             produire des ciments hydrauliques plus ou moins  ’ superficiel, pénétrait ensuite peu à peu dans le cen-
 verre soluble se produit ; on coule la ma­  produire artificiellement et par des moyens fort sim­  énergiques et qui peuvent être utilisés dans les pays  : tre, de telle sorte qu’un échantillon soumis à l’expc-
 ples la plupart des matières minérales cristallisées;
 tière et on la conserve dans des vases bouchés ;  où il n’existe que des calcaires à chaux grasse.  ' rience, il y a quinze ans, et mis sous les yeux de la
 sur les transformations qui se sont accomplies dans
 2° Par voie aqueuse, en chauffant, à la   les organes des végétaux et des animaux dont nous   T. I.  '   20
   153   154   155   156   157   158   159   160   161   162   163