Page 156 - Les merveilles de l'industrie T1
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LE VERRE ET LE CRISTAL.                               151


            sont en pierre de Conflans; ainsi qne sur les   Paris a tiré un excellent parti du verre solu­
           vases du jardin, du même palais du Louvre,   ble pour durcir les ossements fossiles, objets
           qui sont en pierre tendre de Vergelès;     fragiles et précieux (1).
              3° A la grande caserne de Saint-Denis,
           sur le couronnement d’un mur d’enceinte      Une dernière et très-importante applica­
           que le maréchal Vaillant fit exécuter exprès   tion du verre soluble a été faite par
           en pierre excessivement tendre et poreuse.  M. Kuhlmann : nous voulons parler de l’em­
              4° A Lille, les sculptures intérieures de la   ploi de ce même sel alcalin dans la peinture
            Bourse ont été silicatisées par M. Kuhlmann,   en détrempe et dans la peinture sur verre.
           il y a bien des années.                      En 1847,Fuchs avait fait connaître au pein­
             5“ En Angleterre, en Allemagne surtout,   tre Kaulbach le moyen de conserver des fres­
           diverses applications ont été faites du pro­  ques en les vernissant avec une dissolution
           cédé de M. Kuhlmann.                       de silicate de potasse. M. Kuhlmann est allé
             Nos meilleurs architectes, MM. Lassus    plus loin, car il a composé des couleurs silica-
           Lefuel, Viollet-Leduc, etc., ont été les pre-   tées avec des ocres, avec de l’outremer, avec
           miersappréciateursde cette utile application.  l’oxyde de chrome, l’oxyde de cadmium, le
                                                      minium, l’oxyde de manganèse, l’oxyde de
              Un mot sur la teinture des pierres par des   zinc, les sels colorés à base de zinc, le sul­
           procédés semblables.                       fate de baryte, et en général avec tous les
             M. Kuhlmann observa que le silicate de   sels non attaquables par les alcalis.
           potasse, employé seul, laissait au calcaire   M. Kuhlmann a composé, disons-nous, des
           blanc et tendre un ton trop incolore. Il fit   couleurs qui, employées soit directement
           alors ses silicatisations avec un silicate dou­  délayées dans la dissolution siliceuse, soit
           ble de potasse contenant du manganate de   après leur application à la colle, en les re­
           potasse. Ce mélange donne à la pierre le   couvrant d’un vernis siliceux, sont tout à
           ton bistre-brun, si recherché, qu’elle n’ac­  fait fixes et indestructibles quand on s'en
           quiert que par l’effet du temps, après une   sert dans les peintures à fresque ou d’aj-.
           exposition prolongée à l’air, au soleil et à la   parlement. Pour l’application de ces nou­
           pluie. De même, si le ton du calcaire est trop   velles couleurs indestructibles,M. Kuhlmann
           sombre, on mélangera au silicate de potasse   pense qu’il est convenable de silicatiser
           du sulfate de baryte, qui ramènera au gris   préalablement les surfaces calcaires, sur
           le ton noirâtre.                           lesquelles elles doivent s’appliquer. Le sili­
                                                      cate remplit les pores de la surface sur la­
             Nous ajouterons, pour rester dans le     quelle on l’applique, et donne une peinture,
           même ordre d’idées, que M. Kuhlmann a fait   plus nette et plus fraîche que la céruse ou
           des essais de coloration artificielle des coquil­  l’oxyde de zinc.
           lages et coraux par les silicates. En plon­  Les peintures siliceuses s’appliquent éga­
           geant à chaud ces coquillages silicatisés dans   lement bien sur bois ; mais il faut choisir des
           des dissolutions de sels de chrome, de nickel,   bois non résineux. Le frêne, le charme, con­
           de cobalt, ou de cuivre, on obtient des tein­  viennent très-bien. Le bois ainsi préparé
           tures de ces calcaires en jaune, en vert, en   est indestructible et non inflammable.
           bleu, etc... Il y a là tout un champ nouveau   On peut tirer un autre parti très-utile des
           d’études et de résultats que M. Kuhlmann   couleurs silicatées de M. Kuhlmann, en les
            n’a fait qu’indiquer.
                                                       (1) Voir notre Année scientifique et industrielle, quin-
              En 1871, un naturaliste du Muséum de  I zième année, 1872, p. 474.
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