Page 155 - Les merveilles de l'industrie T1
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150                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


           strontiane donneraient des réactions iden­  bonate de potasse , forme de l’hydrofluo-
           tiques.                                   silicate de potasse solide, et de l’acide car­
             Ces faits étant observés et connus, les ap­  bonique qui se dégage.
           plications s’en déduisaient naturellement.
           Il était possible de durcir des calcaires    Les questions théoriques étant vidées,
           tendres et poreux, pour en faire des monu­  disons un mot de la question pratique. Pour
           ments, des statues, des ornements de toutes   appliquer industriellement le verre soluble
           sortes, qui résisteraient aux intempéries   au durcissement des matériaux constituant
           des climats les plus destructifs. Il était pos­  nos habitations et nos monuments, on prend
           sible de faire des pierres artificielles capables   une dissolution de silicate de potasse mar­
           de recevoir un beau poli, des marbres sili­  quant environ 35° à l’aréomètre de Baumé,
           ceux et même des calcaires lithographiques.   et on l’étend de 2 fois son poids d’eau, on
           Bien plus, si les réactions se font sur des   peint, on enduit, à plusieurs reprises, les
           matières pulvérulentes, on obtient un mas­  façades en pierres, neuves ou grattées avec
           tic qui se solidifie, durcit à l’air, et donne   cette dissolution. Avec une brosse, on peut
           le meilleur ciment pour la maçonnerie.     aussi injecter la liqueur à l’aide d’une
             La théorie chimique explique donc par­   pompe munie d’un ajutage en pomme d’ar­
           faitement les faits relatifs à l’action du verre   rosoir. Dans ce dernier cas, on établit au
           soluble sur les pierres tendres, c’est-à-dire le   pied du mur des rigoles d’argile, qui re­
           durcissement de ces pierres ainsi que son rôle   çoivent l’excès de liqueur.
           dans la formation des chaux hydrauliques.    L’expérience a démontré que trois couches,
                                                      appliquées à un jour d’intervalle chacune,
             Si maintenant nous examinons l’action    suffisent pour former une croûte indéfini­
           du silicate de potasse sur le plâtre, nous ;   ment conservatrice, et qui revient à environ
           verrons que le durcissement que cette sub­  75 centimes le mètre carré.
           stance éprouve par son contact avec le sili­  Postérieurement aux essais dont nous
           cate de potasse, provient de la formation du   venons de parler, M. Kuhlmann a fait usage
           sulfate de potasse et du silicate de chaux.   A'aluminate de potasse, après la silicatisation.
           Seulement,, dans ce cas, pour éviter les effets   Il se forme ainsi, dans le corps meme de la
           de la cristallisation du sulfate de potasse à   pierre ou du plâtre, un véritable feldspath
           l’intérieur de la pierre, l’action doit être   artificiel, qui fixe en grande partie la po­
           lente, et les dissolutions de verre soluble   tasse, et permet d’éviter l’emploi de l’acide
           peu concentrées.                           hydrofluosilicique.

             Nous venons de dire que les pores de la    La silicatisation a été appliquée, sous la
           pierre étaient bouchés par de la silice géla­  direction de M. Kuhlmann :
           tineuse et par du carbonate de potasse. Ce   1° Aux divers groupes, statues et frontons,
           dernier sel, qui est déliquescent, pouvant   de l’Ecole militai e. Ces statues et frontons,
           suinter au dehors, et maintenir de l’humi­  qui avaient été faits en pierres très-tendres
           dité sur ce monument, il est bon de le faire   s’étaient entièrement désagrégés, ils ont ac­
           disparaître. Après avoir employé le silicate   quis par la silicatisation une dureté extrême ;
           de potasse, on doit donc, comme nous l’a- |   2° Au Louvre, sur les groupes qui se
           vous dit, traiter les mêmes surfaces par l’a­  [ trouvent sur la façade du Palais-Royal et la
           cide hydrofluosilicique, lequel, pénétrant   rue de Rivoli ; ensuite sur plus de 150 grou­
           dans l’intérieur de la pierre, s’unit au car­  pes, destinés à la cour du Carrousel, et qui
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