Page 94 - Les fables de Lafontaine
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FABLES. — LIVRE PREMIER
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Est-ce assez, dites-moi ? n’y suis-je point encore ?
— Nenni *. — M’y voici donc ? —Point du tout.— M’y voilà ?
— Vous n’en approchez point. » La chétive • pécore *
S’enfla si bien qu’elle creva *. io
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages *.
Tout bourgeois * veut bâtir 4 comme les grands seigneurs ;
Tout petit Prince * a des ambassadeurs ;
Tout marquis • veut avoir des pages •.
Exercice complémentaire. — Faites le portrait d’un vaniteux
qui, comme la Grenouille, veut se faire plus gros qu’il n’est. Vous
pourrez rédiger ce portrait à la façon de La Bruyère.
4. — LES DEUX MULETS
Sources. — Phèdre ; Çorrozet.
Intérêt. — Fable dramatique, illustrant un lieu commun de
morale pratique : pour vivre heureux, vivons cachés. L’intérêt
se concentre sur le Mulet vaniteux dont la gloire et la chute sont
décrites dans une vive et pittoresque antithèse ; l’autre Mulet
n’intervient que pour dégager la morale d’un ton qui exclut toute
pitié.
Deux Mulets • cheminaient, l’un d’avoine chargé,
L’autre portant l’argent de la gabelle • x.
Celui-ci glorieux d’une charge si belle,
N’eût voulu2, pour beaucoup, en être soulagé. t
Il marchait d’un pas relevé • 5^.
Et faisait sonner sa sonnette 3,
Quand, l’ennemi • se présentant,
Comme il en voulait à l’argent,
4. Bâtir : faire bâtir. L’ellipse de faire est habituelle avec ce mot.
1. Entrée en matière directe, 26, b. — 2. Négation, 29, k. —
3. Figure étymologique, 23, q.