Page 91 - Les fables de Lafontaine
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LIVRE PREMIER



                1.  — LA CIGALE ET LA FOURMI

          Sources. — Ésope ; Aphthonius ; Avianus ; Haudent ; Meslier.
          Intérêt. — C’est une fable-trait : le portrait de la chanteuse
        imprudente, le dialogue avec l’ouvrière économe suivant une
        progression destinée à décocher la pointe finale, le vers de sept
        syllabes, la prédominance des rimes plates, tout vise à donner de
        la rapidité. Pas de morale exprimée, pour ne rien alourdir. Mo­
        dèle de narration vive et spirituelle, strictement réduite à l’essen­
        tiel, qui est admirablement mis en valeur.

                  La Cigale *, ayant chanté
                         Tout l’été,
                 Se trouva fort dépourvue *
                  Quand la bise fut venue.
                 Pas un seul petit morceau              5
                  De mouche ou de vermisseau1.
                  Elle alla crier famine
                  Chez la Fourmi, sa voisine,
                  La priant de lui prêter
                  Quelque grain * pour subsister       10
                  Jusqu’à la saison * nouvelle.
                 —  « Je vous paierai, lui dit-elle,      •
                  Avant l’Août *, foi * d’animal,
                  Intérêt et principal *. »                \
                  La Fourmi n’est pas prêteuse,        15
                  C’est là son moindre défaut.
                  —  « Que faisiez-vous au temps chaud ?
                  Dit-elle à cette emprunteuse.

          1. Ellipse, 23, m.
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