Page 41 - Les fables de Lafontaine
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INTRODUCTION                 37


            C)  Le style et la langue des fables
       23. LE STYLE DES FABLES. — Nous ne nous donnerons
     point le ridicule de décrire le style des fables en tête des fables.
     Qu’on les lise. Nous nous bornerons à énumérer les principales
     figures utilisées par l’écrivain, pour la commodité de l’analyse. Les
     voici, classées par ordre alphabétique :
       d) Accumulation. L’accumulation est, comme son nom l’in­
     dique, un entassement systématique de noms, d’adjectifs, de
     verbes, etc.
       Accumulation pittoresque :
              La voilà, pour conclusion,
              Grasse, mafflue et rebondie. (III, 17, 9.)
       C’est une accumulation d’adjectifs destinés à renforcer le trait
     caractéristique. Voici une accumulation dramatique.
              Quelqu’un le reconnut ; il se vit bafoué.
              Berné, sifflé, moqué, joué. (IV, 9, 5-6.)
       L’accumulation des verbes exprime le tumulte des aspects
     simultanés et divers d’une même action. Voici encore une accumu­
     lation dramatique, mais portant sur les circonstances et soulignant
     la violence de l’action :
           Le voilà qui déteste et jure de son mieux,
              Pestant, en sa fureur extrême,
           Tantôt contre les trous, puis contre ses chevaux,
              Contre son char, contre lui-même. (VI, 18, 10-13.)
       Dans l’exemple suivant l’accumulation des infinitifs souligne
     l’acharnement de l’avare :
              Il passait les nuits et les jours
          Es compter, calculer, supputer sans relâche. (XII, 3, 10-11.)
       Donnons maintenant un exemple d’accumulation psychologique,
     les noms soulignant le caractère exigeant du personnage :
                  Cette fille voulait aussi
              Qu’il eût du bien, de la naissance,
              De l'esprit, enfin tout. (VII, 4 bis, 5-7.)
       Autre exemple où l’accumulation souligne un trait de psychologie,
     dans l’espèce, l’agitation de la foule :
          D’où vous vient cet avis ? Quel est votre garant ?
             Etes-vous sûr de cette affaire ?
          N’y savez-vous remède ? et qu’est-il bon de faire ? (X, 3, 22-24.)
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