Page 67 - Vincent_Delavouet
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autorisé à contracter plusieurs unions légitimes. Cela n’im
pliquait pas des mœurs dissolues, bien au contraire. Les
ménages devaient habiter séparément et en général ne se con
naissaient pas entre eux. Les enfants issus de ces unions
restaient auprès de leur mère. On prétend que leur chef, un
certain Brigame Young, avait ainsi quatre-vingt-deux fem
mes ! mais cela ne fut jamais bien prouvé. De mœurs très
rigides, d’une sobriété proverbiale, très accueillante pour
l’étranger, tels sont les principaux caractères de cette peu
plade, dont une partie émigra lors de la promulgation de la
loi en question.
Leur religion protestante est suivie par eux avec ferveur
et même fanatisme. La coutume, pour entrer dans le temple,
était de se dévêtir des habits portés en ville et de s’habiller
tout de blanc. Quant aux étrangers, il leur était interdit d’y
pénétrer.
Sait lake City, ville de 40.000 habitants environ, est la
ville la plus propre que j’aie rencontrée aux Etats-Unis.
L’hygiène y est observée scrupuleusement, les rues lavées à
grande eau. L’eau coule continuellement et, comme la ville
se trouve en pente, cela produit un arrosage continuel. Tout
le monde travaille, on ne connaît pas l’ivresse et, je ne saurais
trop le répéter, quoique la polygamie y soit autorisée, les
mœurs sont des plus rigides.
Me trouvant à l’automne de 1901 tout près de la Californie,
je résolus d’y retourner passer mon hiver. Mais, au lieu de me
diriger sur le sud, je remontai au nord de San-Francisco, à
la capitale même de cet état, qui est Sacramento, ville de
75.000 habitants, mais qui n’a pas progressé comme San-
Francisco, sa voisine, qui renfermait à l’époque plus de
600 à 700 mille habitants. C’est quelques années plus tard, en
1906, que devait être détruite San-Francisco, immense
ville cosmopolite, par un tremblement de terré suivi d’un
incendie qui ne laissa rien debout, sans parler des milliers
de personnes englouties ou brûlées. Depuis, un million
d’habitants ont tout reconstruit.
Revenons à Sacramento et à une petite aventure qui
m’advint dans l’hôtel où j’étais descendu.
Une nuit, je dormais paisiblement et, n’ayant pas d’oreiller,