Page 65 - Decrets mars
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     la vérité  exclusivement  réservée  à  l'autorité  administrative,
     mais  que  leur  nature doit  alors être déterminée  par les attribu-
     tions  des  fonctionnaires  qui  les  ont  ordonnés,  ou  par  une
     dispositiou  formelle  de  la  loi;  que  les  tribunaux  smsis  d'un
     litige,  ont  le  droit  d'examiner,  au  regard de  leur compétence,
     la  légalité  des  actes  soumis  à leur examen  ;
       « Attendu  que  le  déclinatoire  de  Monsieur  le  Préfet  du
     département  de  la  Haute-Savoie  ne  vise  aucuue  disposition
     légale attribuant à l'autorité administrative  le  droit de disper-
     ser à l'aide  de  la  force  armée  et  d'expulser  de  leur  domicile
     sans  le  concours  de  l'autorité judiciaire  les  membres des  con-
     grégatwns  religieuses dépourvues  d'autorisation ;
       • Que  le  décret du  3 Messidor  au  Xll,  spécialement invoqué
     a, au contraire,  réservé au ministère public l'exercice de l'action
     publique, applicable aux mêmes  Congrégations ;
       • Que  l'autorité judiciaire est d'ailleurs investie de la mission
     de  constater les  délits,  d'eu  poursuivre la répression  et d'appli-
     quer les  pénalités édictées  par la loi ;
       « Par ces  motifs,  le  Tribunal,  jugeant  en  référé,  se  déclare
     inco111pétent  quant à la  demande  relative  à  la  main  levée des
     scellés  apposés  sur la  chapelle de  Concise ;  se  déclare  co111pé-.
     tent pour statuer sur les  autres chefs  de  conclusions ;  ordonne
     qu'il  sera  plaidé  au  fond,  renvoie  la  cause  à  l'audience du
     1o décembre courant, depuis réservés.»
       Le  Tribunal  de  Thonon  s'est  donc  déclaré  compétent,
     malgré  le  déclinatoire  du  Préfet,  malg1·é  la  réquisition  de
     M.  le  subtitut  Déchaux,  malgré  les  décisions  antérieures du
     Tribunal des  conflits.
       Il  y a donc maintenant  deux  jurisprudences en  face  l'une de
     l'autre.  Celle  de  l'unique  1'1.  Cazot,  garde  des  sceaux de  la
     République  française  et  celle  de  tous  les  magistrats du  pays
     qui  protégent  les  droits  des  citoyens  contre  l'administration
     devenue juge et partie dans sa  propre cause.
       La  République  est  aux  prises  avec  le  droit,  elle  prétend
     l'écraser par la  force  brutale, le droit résiste par des  arguments
     irréfutables.
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