Page 699 - Les merveilles de l'industrie T1
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LE SOUFRE ET L’ACIDE SULFURIQUE. G95
l’inertie des propriétaires qui abandonnent gne, vint, par hasard, aboutir à la région in
une source de revenus devant un accident cendiée. Par cette voie accidentelle de com
sans importance? munication, on vit s’écouler des masses énor
On commence à extraire le minerai à la I mes de soufre fondu, qui provenaient de la
profondeur de 30 mètres. Les galeries sont ’ partie profonde de la montagne en proie à
creusées sans aucun plan préalable, et sim l’incendie : c’était du soufre pur provenant
plement dans la direction d’où l’on espère de la fusion du minerai. On se mit en devoir
tomber sur la couche de soufre. Quand on de le recueillir, et on obtint ainsi environ
a rencontré cette couche, on creuse des 70,000,000 de kilogrammes de soufre, sans
chambres de 10 à 12 mètres de largeur et compter celui qui fut perdu, parce qu’il cou
de 20 mètres de hauteur, dont on soutient lait dans une petite rivière passant près de
le plafond en laissant subsister des piliers la mine.
de terre de 3 à 4 mètres d’épaisseur. Les en Si Fou nous demande quelle est la ri
fants remontent le minerai le long des mar chesse en soufre des minerais de la Sicile,
ches de l’escalier taillé dans la galerie. nous répondrons que rien n’est plus variable,
Deux accidents très-différents, l’eau et le en raison de l’irrégularité avec laquelle se
feu, menacent les mines de soufre. Quand on sont faits les dépôts de soufre sortis de l’Etna
est inquiété par les eaux, les petits porteurs j ou de ses alentours. Les minerais de qualité
de minerai épuisent l’eau avec des cruches, , inférieure renferment en moyenne 10 à 25
qu’ils remontent au dehors. Si le travail à | p. 100 de soufre; mais la proportion ordi
bras ne suffit pas pour obtenir l’épuisement, [ naire est de 15 à 18 p. 100. Dans beaucoup
on fait quelques saignées horizontales, qui d’exploitations on travaille des minerais qui
donnent écoulement aux eaux. Quand ces ne renferment que 6 à 8 p. 100 de soufre.
moyens sont impuissants, on abandonne la
mine, ainsi que nous le disions plus haut. Nous avons maintenant à examiner par
Installer dans une soufrière, une machine à | quels moyens on retire le soufre de ces
vapeur, pour dessécher les eaux, paraîtrait minerais, et nous aurons l’occasion de cons-
bien simple aux ingénieurs français, anglais, | tater que si les travaux miniers sont singu
allemands ou belges ; mais allez dire cela lièrement arriérés en Sicile, les procédés
aux propriétaires et ouvriers siciliens ! de traitement du minerai, pour en obtenir
L’incendie n’est pas fréquent dans les mi- ■ le soufre, ne sont guère plus avancés, et don
nés de soufre ; mais quand cet accident ar nent lieu à des pertes énormes de produits.
rive, il n’a guère de remède. On n’a d’autre । Depuis une longue série de siècles, la ra
ressource que de boucher l’orifice, et de lais reté du combustible, l’absence de routes et
ser la combustion du soufre s’arrêter d’elle- de moyens de transport, ont conduit à adop
même. Une fois déclaré dans une mine de ter un procédé qui n’est que le rudiment
soufre, le feu persiste plusieurs années. A I de l’art métallurgique. Rien n’a été change
Sommatino, une certaine partie de la mon- ! dèpuis les Romains au système d’extrac
tagne est à feu depuis cinquante ans. En ! tion du soufre usité en Sicile. Si, par aven
1787, la mine de Solfatara-grande,^v'es de ture, Cicéron, qui fut questeur en Sicile, si
Sommatino, fut la proie d’un incendie si vio Archimède, qui illustra Syracuse, sa pa
lent, qu’on fut obligé de l’abandonner. Le trie, par ses découvertes et son génie, ve
soufre brûla sous terre, pendant deux ans. Au naient, l’un ou l’autre, visiter de nouveau ces
bout de ce temps, une nouvelle mine que l’on contrées, ils retrouveraient encore en vi
ouvrit dans la partie inférieure de la monta- I gueur, en plein xix' siècle, les moyens qui ser-