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396                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                       « La pâte pour la fabrication de la porcelaine   deaux qui les portaient fussent de même pâle. Du
                     tendre était composée, dit Brongniart, ainsi qu’il   sable pur, simplement pétri, avec un peu d’eau,
                     suit :                                    placé entre les supports et la pièce, empêchait leur
                         Nitre fondu...........................  440 ou 22,0  adhérence mutuelle.
                         Sel marin gris......................  146  7,2  « La cuisson de la porcelaine tendre était bien
                         Alun......................................  74  3,6  plus longue que celle de la porcelaine dure; elle
                         Soude d’Alicante..................  74  3,6  exigeait de soixante-quinze à cent heures, et con­
                         Gypse de Montmartre.........  74  3,6  sommait de 32 à 40 stères de bois de tremble.
                         Sable de Fontainebleau.......  1212  60,0  « On donnait le vernis au biscuit par arrosement.
                                              2020   100,0     Pour que le vernis, délayé en consistance de bouil­
                                                               lie, ne se précipitât pas trop promptement, on y
                       «Après avoir bien mêlé ces matières, on les faisait
                     fritter, soit dans le four à biscuit, soit dans un four   ajoutait du vinaigre.
                                                                 «Les pièces mises en vernis se repassaient au four
                     particulier.
                       « On broyait cette fritte, on la lavait à l’eau bouil­  sans support, dans des étuis semblables à ceux du
                     lante, et l’on enfermait la pâte, en lui donnant du   biscuit, mais enduits intérieurement du même ver­
                     corps avec de la craie et de la marne calcaire, dans  nis, afin qu’ils n’absorbassent pas celui des pièces
                                                               qu’ils enveloppaient.
                     les proportions suivantes :
                                                                 « Les porcelaines faites à Saint-Cloud dès 1695, à
                         Fritte précédente...................... 90  ou  75  Chantilly, à Orléans, à Villeroy, étaient des porce­
                         Craie blanche............................ 20   17
                         Marne calcaire du terrain gyp-        laines tendres, fabriquées par des procédés sembla­
                           seux d’Argenteuil..............  10   8  bles à ceux que l’on vient de décrire. Les produits
                                                               de la manufacture de Saint-Cloud étaient compa­
                                                120   100      rés par le docteur Martin Lister, voyageur anglais,
                       « Tous ces matériaux devaient être intimement   en 1698, aux belles porcelaines de la Chine. Cette
                     mêlés, broyés avec de l’eau au moulin, et passés au   fabrique faisait déjà des objets remarquables en
                     tamis de soie.                            1718. Celle de Chantilly avait été fondée par un ou­
                       « Le vernis se composait comme il suit :  vrier de la précédente. Celles de Tournay, de Saint-
                                                               Amand-les-Eaux, appartiennent aussi à cette section
                          Litliarge..................................... 82  ou 42,105  des porcelaines tendres; mais les produits de ces fa­
                          Sable de Fontainebleau calciné. 58   29,7
                         Silex calciné..............................  24   12,3  briques, plus épais, plus lourds, moins blancs, moins
                         Carbonate de potasse...............   11   5,64  bien glacés que ceux de Sèvres, présentèrent une
                          Carbonate de soude................... 20   10,255  telle infériorité en comparaison de ces derniers,
                                                               que, vers 1775 ou 1780, la plupart de ces fabriques
                                                195   100,000
                                                               cessèrent leurs travaux, ou firent de la porcelaine
                       « Les matières, mêlées et broyées, étaient fondues   dure. On continua néanmoins d’en faire à Tournay,
                     sous le four dans des creusets, pilées et broyées de   à Arras, à Saint-Amand, parce que, si les produits
                     nouveau, et fondues une seconde fois.     de ces manufactures étaient moins beaux que ceux
                       « La pâte, n’ayant aucun liant, ne se prêtait que   de Sèvres, ils étaient à un prix qui en permettait
                     très-difficilement au façonnage par l’ébauche; il   1 usage à un bien plus grand nombre de personnes,
                     fallaitjnouler toutes les pièces.         et ils avaient une ténacité qui les faisait résister
                       « Les moules étaient faits en plâtre ; ils avaient une   longtemps aux fractures par choc (1). »
                     très-grande épaisseur ; ils donnaient l’extérieur de la
                     pièce. Un noyau également en plâtre en donnait gros­  La porcelaine tendre se fabrique de nos
                     sièrement l’intérieur: ce noyau comprimait la pâte   jours, en France, à Tournay, à Saint-Amand
                     dans le moule au moyen d’une presse.
                       « Les pièces moulées ainsi étaient réduites à leur   et à Arras. On l’emploie généralement
                     épaisseur et finies en les tournassant sur le tour.  dans les restaurants de Paris, en raison
                       « Le garnissage se faisait comme pour les autres   de sa lourdeur et de sa résistance aux chocs.
                     poteries ; les garnitures se collaient sur la pièce
                     principale avec de la barbotine.          Cependant, si elle est plus tenace et sup­
                       « Les pièces terminées étaien t encastées, pour être   porte mieux les chocs que la porcelaine
                     portées au four. Ces pièces, éprouvant par la cuisson   dure, elle résiste moins bien aux change­
                     deux changements, le ramollissement et le retrait,   ments de température.
                     exigeaient beaucoup de soin pour leur encastage.
                     11 fallait en soutenir toutes les parties saillantes   La composition de la pâte de la porce­
                     avec des supports de même pâte, ajustés de manière   laine tendre de Saint-Amand est la suivante :
                     qu’en soutenant la pièce, ils en suivissent le re­
                     trait ; par conséquent, il fallait aussi que les ron­  (t) Dictionnaire technologique, article Poteries.
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