Page 33 - Decrets mars
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          r.une  loi ne  m'oblige à sortfr, je  n'ouvrirai  pas ..... •  Le  sous-
          préfet ordonne au  serrurier de faire sauter la grille qm  cède au
          preaier  ll'ort.
            M. Emile Carion franchit la cour, suivi  du  lieutenant de gen-
          darmerie. il  frappe  trois  fois  à la grande  porte,  en  répétant de
          la voix.  particulièrement  timbrée  qu'on  lui connait : • Au  nom
          de la  loi,  ouvrez ! • Ses trois sommations restant sans 1·éponse,
          il  se décide à faire  avancer le  sernmer avec ses outils.
            L:i foule  arrêtée vers la croix  fait  alors  entendre un  cri stn-
          d nt de : c •  bas I  crocheteur !  Vive  la  liberté ! »  Ceux  qui
          ont pu  rompre la  barrière ou  la  tourner en passant  par  les jar-
          dins et  les vignes,  forment déjà  un  groupe  imposant autour de
          l'enceinte et crient à leur  tom· :  Vivent  les  Capucrns ! Vive  la
          religion  ! Vive la liberté ! " Des  voix vibrantes  y répondent  de
          l'intérieur. La  porte  attaquée avec pinces,  leviers et pressons
          résiste longtemps,  mais  l'ouvrier  frappe à coups  redoublés et
          finit par briser cette première  Wture.
            Persoane  n'est lâ. Le sous-préfet  désappornté  frappe  à une
          antre  porte. Il  fait ses  trois  sommations,  nul  ne 1111  répond,  le
          serrurier avance  et,  après  vingt  minutes d'efforts,  cette porte
          est encore br'
            Personne n'appa1·aît. Les agents de la force se répandent dans
          le petit cloitre d'entrée.  Le sous-préfet  frappe de nouveau à la
          porte et somme  trois  fois  de lui ouvl'ir au nom  de la 101.  Cette
          fois  on  lui  répond du dedans : • C'est au nom de la loi que nous
          refusons  d'ouvrir 1 •  Le serrurier se met à I'  u r  ,  tt:Dle  vai-
          n menl de forcer la serrure. ioue du  levier,  frappe de 1a bâche ;
          ma·  la  porte lient bon.  1,  coup.  retentis.~nts  e font enten-
          dre  jusqu'à  l'eutr~.,  riP.  la ville et grossissent  la  roule  àe plus
          en plus.  Les cris  commencent à être nourris et semblent  ·011-
          loir  couvrü· le bruit  épouvantable  du  marteau et de la  baclt  .
          Cette  réflexion  parvient  aux  oreilles  du  sous-prefet  et  des
          agents de  la force  armée : « Singulier  spectacle  que de voir le
          représentant du  gouvernement derrière un serrurier brisaol 1
          portes, pour envahir le domicile de  citoyens  inoffensifs. »
            Fatigué,  essoufflé,  le  malheureux ouvrier  s'arrête un instant
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