Page 38 - Decrets mars
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LA POUIISUITE DANS LES CELLULES
La cour et l'église évacuées. le sous-préfet suivi de ses
gens, monte au dortoir du cloitre, cherchant toujours le Père
Frédéric. Tous les corridors sont déserts, toutes les portes
closes. Au-dessus de chaque cellule est écrit le nom d'un
saint de l'ordre séraphique et, sur chaque porte, uue main
vient d'écrire à la craie : Vive la liberté!
Le sous-préfet se présente au hasard devant la cellule N° 7.
Saint Fidèle de Symaringen. Il fait ses trois sommations.
Point de réponse. Le serrnrier brise la porte. Le sous-préfet
Jencontre alors devant lui un religieux de grande et belle
taille. entouré de ses témoins : il est assis. C'est le Père Hip-
polyte qui demande ce qu'on lui vent. Le sous-préfet l'informe
qu'il vient l'expulser et lui donner lecture de l'arrêté préfec-
toral. Le religieux se levant, déclare qu'il ne sortira que con-
traint par la force.
M. l'avocat Bordeaux s'avance et fait entendre au sous-préfet
une protestation basée sur la législation en vigueur avant
l'annexion de la Savoie à la France ; il dit que le P. Hippolyte,
savoyard, ayant fait ses vœux avant 1860, a un état civil dont
Je gouvernement français ne peut omettre de tenir compte; que
vis-à-vis de lui surtout, le décret du 29 mars et l'arrêté
d'expulsion sont entachés d'illégalité, et que toutes réserves
sont faites pour faire valoir en temps utile ses droits et actions
en justice contre quiconque y aura porté atteinte.
Les gendarmes, sur l'ordre du sous-préfet, prennent le
P. Hippolyte, qui sort de sa cellule accompagné de ses témoins.
A peine apparaît-il à la porte du couvent que la population
l'accueille par les cris de: Vivent les cap11cins ! Vive la liberté!
A bas les décrets !
Les fidèles expulsés de la chapelle ont employé leur temps
à prendre dans les jardins voisins, à !'applaudissement des
•propriétaires, tout ce qu'ils y ont trouvé de branches de
auriers et de fleurs ; ils en ont fait des couronnes et des