Page 40 - Decrets mars
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troisième fois sa demande : puis il mv1te finement le Père
Pacifique a lui déclarer s'il n'a rien à communiquer au gardien;
dans ce cas, il s'empressera de le lui laisser voir. Le religieux
t'épond négativement. M. Jean Portier proteste d'une voix
tonnante qu'il ne sortira que par la force. Ils sont traînés à la
porte et acclamés toujours aux cris de: Vivent les capucins!
Vivent les défenseurs de la foi !
Cellule N° 8. Saint Joseph de Léonisse. - C'est celle
du Frère Marcellin, bon vieillard qui compte 47 ans de pro-
fession ; les émotions des jours précédents comme de celui-ci
l'ont brisé, il est au lit. Le sous-préfet n'entend pas que l'on
soit malade, il se fâche : • C'est donc une farce que l'on veut
me jouer'!... Veut-on me faire croire que ce couvent est un
hôpital? » Cependant, ces messieurs parviennent à lui faire
comprendre que, s'il veut expulser ce religieux il va falloir le
transporter quelque part : cet homme demande des- soins. Le
sous-préfet laisse dans sa cellule le vieux Frère l\larcellin qui,
pendant les pourparlers, n'a pas changé de position.
Le fonctionnaire continue ses recherches avec un zèle
minutieux, il fait enfoncer la porte d'une chambre de décharge,
visite toute la lingerie et pousse si loin ses investigations que,
malgré la douloureuse gravité du moment, elles arrachent un
sourire à ceux qui en sont témoins.
Cellule N° 11. Saint Joseph de Cupertino. - Habitée par
le R. P. Jérôme, vicaire. Quand la porte a cédé, le sous-préfet,
apercevant à l'iutérieur le jeune Vaudaux, laisse échapper un
geste de dédain : « Un enfant !.. . il ne fallait pas le rendre
témoin de ces choses! ... - Pardon, reprend M. Vaudaux, cet
enfant est le mien, j'ai tenu, au contraire, à ce qu'il assistât à
ce lamentable spectacle afin quïl en gardât le souvenir pen-
dant toute sa vie. » Le P. Jérôme avait dans sa cellule M. le
comte G. de St-Bon qui a remis sa protestation à Monsieur
le sous-préfet.
Pâle, ému jusqu'aux larmes, le R. P. Jérôme, son crucifix à
la main, est poussé j 11squ'à la porte où il reçoit une ovation
admirable. La foule l'arrête et lui demande de la bénir.