Page 38 - Bouvet Jacques
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surplombent, ou amenés par des inondations, en-
combrent en cet endroit le lit de la Dranse. L'On-
cle Jàcques fit tailler avec la pique des pas dans
ces roches abruptes. Celui qui a le pied et la tête
solides peut encore escalader ce pont dangereux et
franchir la rivière. Dans des moments d'alerte, le
missionnaire ou les réquisitionnaires réfractaires,
en se glissant par les couloirs et les anfractuosités
de Brama ça y, venaient utiliser ce passage et
allaient chercher un abri dans quelque grotte
escarpée de Féternes. La date de cet utile travail,
avec les noms de ceux 9.ui y ont concouru, est
consignée dans les registres de Reyvroz, où nous
l'avons vue.
Outre les dangers de chaque jour, qui pourrait
dire les privations et les fatigues éprouvées par
l'homme de Dieu I Que de nuits sans sommeil 1
Que de jours passés sans manger autr.e chose que
quelques baies sauvages ou quelqÙes vieilles
croûtes de pain noir, séchées dans la poche de sa
casaque I A certains moments, il évitait les mai-
sons habitées, non par aucune crainte pour son
compte, mais pour ne pas compromettre ses sau-
veurs ; il se retirait alors plus volontiers dans des
granges isolées, dans des chalets déserts, dans des
ravins ou des forêts.
Quoique les populations du Biot, de La Vernaz
et de Reyvroz lui fussent profondément dévouées
et fidèles, chaque commune avait cependant quel-
que patriote ardent. Reyvroz n'avait qu'un sans-
culotte, le nommé Blanche Joseph, agent natio-
nal; il était l'effroi de sa commune et des alen-