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Vers une heure du matin, les parachutes sont largués et
ceux qui les attendaient connaissent les secondes les plus
émouvantes de leur vie de « maquisard ». Tout le monde se
met au travail. Nous recueillons d'abord deux parachutistes,
un ballot d'appareils «radio» et un ballot de bagages. Hélas,
les cylindres d'armes sont tombés plus à l'est. La clairière
est rapidement explorée, mais sans résultat. Le temps passe,
l'énervement commence à gagner nos camarades. Vers l'aube,
nos gars s'aperçoivent avec stupéfaction que tous les « con-
tainers » sont tombés dans des terres exploitées par une fa-
mille de collaborateurs dont le père et les trois fils sont des
S.O.L'. acharnés. A peine nos amis ont-ils débouché du bois
de Draillant, qu'ils constatent que les Vichyssois sont en
train de piller les cylindres.
Que faire ? Comment réagir ? Nous sommes sans armes.
Heureusement, l'un des nôtres fait preuve d'un grand sang-
froid. Tl s'avance, très digne, jusqu'à une dizaine de mètres
des pillards, se fige au garde-à-vous et lance d'une voix de
tonnerre quelques mots d'allemand sans aucun sens. Puis il
fait le salut nazi et pousse un retentissant « Heil Hitler» ...
0 miracle, les trois hommes pâlissent, bafouillent et tentent
d'expliquer qu'ils ne sont pour rien dans l'affaire. C'est en
retenant une folle envie de rire que notre ami les entraîne dans
leur ferme où il explose encore une fois: « Raus, Franzosen !
Tous terroristes, tous kaput ! » Sur ces entrefaites Boujard
arrive et présente une vieille carte d'inspecteur de police. Il
affirme aux miliciens atterrés que c'est un avion allemand en
difficulté qui a été obligé de làcher son chargement et qu'ils
sont exposés à des sanctions très graves pour v avoir touché.
Il enchaîne: « Essayez de vous arranger avec le grand Fritz.
Peut-être que si vous lui offrez à manger et à boire, il ne·
fera pas d'histoires ».
Et c'est ainsi que quelques F.T.P. purent se restaurer au
compte des disciples de Darnand, une fois le matériel à l'abri.
Cochard prévenu immédiatement, charge la compagnie de
ramener dans la nuit même tout le matériel à Allinges, à quel-
que trente kilomètres de là. L'opération réussit ,Hl prix de
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