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fant  que  de  refermer  l'étreinte  sur  le  maquis,  d'investir  com-
           plètement  le  Plateau.  Dès  lors,  plus  de  renforts,  de  ravitail-
           lement.  Aucune  position  de  repli  ne  pouvait  être  envisagée.
           Accepter  le  combat  dans  ces  conditions,  c'était  se  battre  le
           dos  au  mur,  sans  espoir  d'en  réchapper.
              Les  « techniciens »  qui  préconisaient  ce  rassemblement,
           nous  disaient  que  pour  frapper  l'ennemi,  il  fallait  d'abord
           opérer  une  concentration  de  forces.  Triste  dégénérescence
           d'un  principe  sacré  de  notre  Ecole  de  Guerre !  Ce  que  ne
           voyaient  pas  ces  piètres  stratèges,  c'est  que  la  concentration
           des  forces  jouait  au  profit  de  l'ennemi.  En  effet,  si  les  pa-
           triotes  se retiraient  à  l'écart sur  une  montagne,  s'ils  laissaient
           aux  boches  et  à  leurs  valets  toute  liberté  d'action,  il  est  évi-
           dent  que  ceux-ci  en  profiteraient  pour  amasser  des  moyens
           en  hommes  et  en  matériel  nettement  supérieurs.  L'essentiel
           était  de  conserver  l'initiative  des  opérations.   Or  celle-ci
           échapperait  fatalement  au  maquis,  puisqu'il  se  laissait  en-
           cercler.
              Telle  fut  la  base  de  notre  argumentation  lorsqu'il  fallut
           discuter  de  ce  problème  avec  les  chefs  de  l'A.S.  Tels  furent
           les motifs qui  nous  poussèrent à  ordonner à  nos  détachements
           de  ne  pas  se  rendre  sur  le  Plateau  en  dépit  des  appels  de
           Londres.  Les  événements  ne  devaient,  hélas,  pas  tarder  à
           nous  donner  raison.
              Sur  les  Glières,  400  hommes  environ  formaient  le  « ba-
           taillon»  du  lieutenant  Morel,  appelé  Tom.  Le  14  et  le  20  fé-
           vrier  1944,  deux  parachutages  lui  apportèrent  une  masse
           d'armes  et  d'équipements.  Malheureusement,  le  lieutenant
           Morel  poursuivait  surtout  l'entreprise  chimérique  de  réaliser
           un  accord  avec  les  forces  de  répression,  et  le  9  mars  1944,
           il  était  traîtreusement  abattu  à  Entremont  par  un  comman-
           dant  de  G.M.R.  à  qui  il  avait,  dans  un  geste  chevaleresque,
           laissé  une  arme  pendant  la  discussion.
              A la  mort de  Morel,  le  commandement passa  au  capitaine
           Anjot,  qui  eut  alors  à  faire  face  aux  attaques  des  m11iciem,
           et  des  Allemands;  c'est  à  ce  moment  que  débutent  les  opé-
           rations  importantes  contre  les  Glières.

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