Page 276 - Merveilles Industrie Tome 4

270 MERVEILLES DE L INDUSTRIE.

térieure, n’atteignant pas brusquement de blerait et lui donnerait des propriétés nui-
trop grandes limites, n’amène pas la casse i sibles.
des bouteilles, la température des caves peut On appelle, en Champagne, dégorgement.
facilement être maintenue à un degré con­ l’opération qui consiste à débarrasser les
venable. Mais lorsque la casse multiplie les bouteilles de leur dépôt.
explosions des bouteilles, le vin qui se ré­ Le dégorgement est plus ou moins facile
pand au dehors entre en fermentation acé­ suivant la forme qu’affecte le dépôt. S’il a
tique. Comme un grand dégagement de cha­ pris, comme on l’appelle en Champagne, la
leur accompagne cette réaction chimique, forme de masque, c’est-à-dire s’il se compose
la température des caves atteint rapide­ d’une pellicule adhérente au verre, tout le
ment 4- 18 ou + 20°, et cette température travail fait pour mettre le vin en bouteille est
augmente le mal. Alors, si l’atmosphère est perdu, car ce dépôt ne peut être détaché. Il
orageuse, une sorte de fièvre semble s’empa­ faut déboucher la bouteille, remettre le vin
rer du vin. Les bouteilles volent en éclats, et dans le tonneau et lui faire subir de nou­
leurs débris, lancés avec violence, vont briser veaux collages, enfin le mettre en bouteille
cinq ou six de leurs voisines. Les vibrations à nouveau.
de l’air, les secousses imprimées aux treilles, On évite la formation du masque adhé­
font éclater d’autres bouteilles, qui sans cela rent, par l’usage du tannin et de l’alun ;
auraient résisté à la tension intérieure du gaz. mais ces deux substances, dont on abuse en
Le désastre prend alors des proportions con­ Champagne, ne sont pas sans inconvénients
sidérables ; il peut aller jusqu’à 70 pour 100. pour le vin, ni parfaitement inoffensives
Pour les conjurer, on arrose les treilles pour le consommateur.
avec de l’eau fraîche, ou l’on inonde les ca­ Le dépôt est facile à enlever quand il est à
ves, qui sont pourvues, à cet effet, de tuyaux l’état pulvérulent.
d’arrosage et de rigoles creusées dans le sol Pour opérer le dégorgement des vins, on
pourfaire couler l’eau des arrosages. On em­ commence par mettre les bouteilles sur
ploie même la glace, soit pour en couvrir pointe. Expliquons ce terme. Mettre sur
les tas, soit pour refroidir l’eau avec laquelle pointe c’est placer les bouteilles renver­
on les arrose. On est quelquefois obligé sées dans les trous d’un pupitre formé de
de transporter les bouteilles dans une cave deux montants de bois de lm,60 de hauteur
plus froide ; mais ce moyen n’est pas tou­ sur 0m,90 de largeur, assemblés par des
jours facile, et il offre quelque danger pour charnières, et s’écartant l’un de l’autre à peu
les ouvriers, si l’on opère le transport au près de 80 centimètres.
moment où le vin est en pleine fièvre. La figure 175 représente l’espèce de pu­
pitre que nous décrivons. Chacun des
Après deux ans et demi et parfois trois montants est percé de dix rangées de six
ans de cave, la fermentation a enfin par­ trous ; ces trous sont oxrales, leur grand
couru toutes ses périodes, le vin est en diamètre estde 10 centimètres etle plus petit
mousse, et tout ferment est détruit. Cepen­ de 9. Ils sont taillés obliquement, de ma­
dant le vin ne pourrait encore être expédié nière à présenter leur partie déclive à l’in­
ni livré à la consommation. En effet, il s’est térieur du pupitre où leur bord supérieur
formé dans la bouteille un dépôt assez abon­ est de 4 centimètres en contre-bas de celui
dant, composé de ferment altéré. 11 faut du dehors. On peut maintenir les bou­
nécessairement expulser ce dépôt; car sa teilles dans ce trou sous plusieurs angles.
présence rendrait le vin âcre, le trou­ On place d’abord les bouteilles horizonta­