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             mières, a été formulée plus récemment.     tend de la mer Rouge au Liban. Les ter­
               On admet que de la vapeur d’eau portée,   rains crétacés des bords du bassin de la mer
             par le foyer central du globe, à une tempé­  Morte sont riches en matières salines et en
             rature très-élevée, et douée, par conséquent,   matières bitumineuses. Des dépôts de lignite
             d'une prodigieuse force élastique, a pu tra­  existent au-dessous de ces gisements. Le
             verser des dépôts organiques, c’est-à-dire   bitume imprègne les calcaires du rivage de
             de la houille, et en opérer la décomposition.   la mer Morte, à peu de distance du Ras-
             Cette vapeur d’eau a pu entraîner les pro -   Mersed où l’hydrogène sulfuré se dégage de
             duits de la distillation de la houille dans   l’eau, et où le bitume lui communique son
             des couches plus élevées de l'écorce terrestre.   odeur caractéristique. La mer Morte elle-
             Ces produits de la distillation de la houille,   même paraît recevoir du fond de son bas­
             contenant le bitume, ont ainsi opéré l’im­  sin les matières salines dont elle est saturée,
             prégnation des roches qui se sont rencon­  et le bitume qui vient, de temps en temps,
             trées sur leur parcours souterrain, effectué   nager à sa surface. Ce bitume présente alors
             de bas en haut.                            une consistance molle et ne se solidifie que
               M. Daubrée a prouvé que cette transfor­  par l’exposition à l’air.
             mation n’avait rien d’impossible au point de   Les sources thermales sont nombreuses
             vue chimique. Ayant soumis du bois à l’ac­  dans la région des puits de bitume de Ba­
             tion de la vapeur d’eau surchauffée, M. Dau­  kou.
             brée a recueilli successivement du lignite,   On trouve également du bitume dans les
             c’est-à-dire une matière incomplètement    eaux mères des puits de feu de la Chine.
             carbonisée, de la houille, enfin de l’an­  11 y est associé au chlorure de sodium et au
             thracite, c’est à-dire de la houille privée de   chlorure de magnésium.
             matières bitumineuses.                       Au Puy de la Poix, en Auvergne, l'hydro­
               Telles sont les trois hypothèses qui ont été   gène sulfuré se dégage de la roche, en même
             émises pour expliquer l’origine des dépôts   temps que le bitume.
             bitumineux.                                  En Alsace, le fer et l’arsenic associés au
               La théorie de l’origine organique peut   bitume, semblent être restés dans les gise­
             être considérée comme l’expression des faits,   ments de Bechelbronn et de Lobsann, comme
             dans certains cas particuliers : pour le bi­  pour attester que des couches profondes du
             tume de la Trinité, par exemple.           globe, pendant les premières périodes géo­
               La seconde théorie, c’est-à-dire celle de   logiques, jaillirent des gerbes d’eaux miné­
             l’origine éruptive, est confirmée parla con­  rales, dont les sources actuelles ne seraient
             sidération d’un grand nombre de gisements   plus que les derniers vestiges.
             en Auvergne. Mais, en dehors de certains     La présence simultanée du bitume et des
             gisements, cette théorie n’explique pas, aussi   matières minérales en maintes localités, a
             bien que la troisième, c’est-à-dire la théorie   été signalée par M. Daubrée comme digne
             hydro-thermale, le fait général de l’associa­  de remarque. Ce géologue s’exprime ainsi,
             tion si fréquente du bitume et des eaux mi­  dans sa Description géologique et minéralo­
             nérales naturelles thermales.              gique du Bas-Rhin.
               Rien de plus commun, en effet, que cette
             association du bitume et des eaux miné­      « Il y a déjà longtemps que Dielrich a signalé la
             rales. Les sources thermales et les gîtes bi­  fréquence de l’association du bitume et des sources
                                                        salées, en France et en Italie. Celle association,
             tumineux sont échelonnés le long de l’axe de   quoique n’étant pas conslante, se retrouve dans des
             dislocation des couches crétacées, qui s’é­  lieux très-distincts les uns des autres, notamment
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