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LES ALLUMETTES CHIMIQUES.                               587

        nuer les dangers inhérents à ces allumettes,   du chlorate de potasse entraîne d’immenses
        peuvent être classés comme il suit :      dangers quand on mélange ce sel à un pro­
          1° La très-ingénieuse disposition imaginée   duit aussi inflammable que le phosphore.
        par un fabricant suédois, M. Lundstrôm, qui   Aussi la préparation de ce mélange dans les
        consiste à étaler du phosphore rouge sur une   fabriques était-elle une cause continuelle
        surface à part et à composer l’allumette de   de dangers ; en outre ces allumettes no
        substances combustibles, mais exemptes de   brûlaient qu’avec explosion. Ce double in­
        phosphore, ce qui diminue très-notablement   convénient força à proscrire, dès leur appa­
        les chances d’incendie.                   rition, ce nouveau genre d’allumettes. Peut-
          2° Les allumettes androgynes, modifica­  être aurait-on réussi, dès cette époque, si l’on
        tion, sans importance, de la méthode sué­  eût remplacé, comme on le fit plus tard, le
       doise.                                     chlorate de potasse par une substance moins
          3° Les allumetles sans phosphore, solution   combustible, telle que le nitre, le sulfure
       théorique la plus rationnelle du problème   d’antimoine, etc.
       qui nous occupe. Déjà tentée, mais sans      C’est d’après ces premiers insuccès dans
       succès pratique, par Mme Merkel, la fabri­  l’emploi du phosphore rouge, que M. Lund­
       cation des allumettes sans phosphore a été   strôm, de Jonkoping, en Suède, eut l’ingé­
       amenée à un degré avancé de perfection     nieuse idée de séparer le phosphore rouge
       par M. Canouil, qui a désigné ce nouveau   de la pâte inflammable, et de composer,
       produit sous le nom A'allumettes sans phos­  qu’on nous passe l’expression, une allumette
       phore ni poison.                          en partie double, en étalant le phosphore
         Allumettes suédoises, ou au phosphore   rouge sur une surface à part, destinée à servir
       rouge. —La découverte du phosphore rouge,   au frottement, tandis que la pâle de l’allu­
       ou amorphe, c’est-à-dire incristallisable, est   mette ne contenait que du chlorate de potasse
       une des plus intéressantes et assurément des   et quelques autres substances combustibles.
       plus utiles que l’on ait vues s’accomplir à   La pâte de ces allumettes était formée de :
       notre époque. Elle est due, comme nous l’a­
                                                     5 parties de chlorate de potasse.
       vons dit dans l’histoire chimique du phos­
                                                     2   —  de sulfure d’antimoine.
       phore, à E. Kopp, de Strasbourg, et à         1   —   de colle.
       Scbrôtter, de Vienne. Si l’on expose pen­
       dant quelques jours le phosphore ordinaire   Cette élégante solution du problème trou­
       à 4- 260° environ, le phosphore subit, par   vée par le fabricant suédois, réunit trois
       cette seule action du calorique, une mo­  espèces d’avantages. En faisant usage du
       dification si complète, qu’il constitue vérita­  phosphore rouge, on se met à l’abri de toute
       blement alors un corps très-différent du phos­  cause d’empoisonnement. En second lieu, la
       phore ordinaire. 11 est moins inflammable   disposition qui consiste à séparer le phos­
       que ce dernier, et n’est nullement vénéneux.  phore de l’allumette proprement dite, rend
         Peu de temps après la découverte de     les incendies, non pas impossibles, mais in­
       Schrôtter,un fabricant de Vienne, J. Preshel,   finiment plus difficiles qu’autrefois. L’emploi
       substitua, dans la composition des allu­  du phosphore rouge a ce troisième avantage
       mettes chimiques, le phosphore rouge au   de ne pas exposer les ouvriers employés au
       phosphore blanc. Ce fabricant composa des   travail des allumettes aux maladies qui ré­
       allumettes avec un mélange de chlorate    sultent de la manipulation habituelle du
       de potasse et de phosphore rouge. Malheu­  phosphore blanc. Et voici l’explication de
       reusement, la combustibilité extraordinaire   celte dernière particularité. Comme nous
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