Page 356 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                             351

           meurent quelques jours en contact avec lui,   Quand la pâte est bien malaxée, bien pé­
           l’attaquent, le dissolvent, et peuvent com­  trie, on procède au façonnage.
          muniquer aux aliments et aux boissons des    Le tour du potier, l’antique engin dont la
           propriétés funestes.                      connaissance remonte jusqu’aux potiers de
             Le bas prix de cette poterie fait que le   l’ancienne Égypte (l’an 2000 avant J.-C.) est
           peuple lui donne la préférence, même à    connu de tout le monde. On sait qu’il se
           prix égal, sur la faïence, parce que la faïen­  compose (fig. 254) d’un disque plat, ou roue
           ce n’offre pas ses couleurs voyantes et son   pleine, que l’ouvrier met en mouvement sur
           vernis luisant, choses qui attirent et char­  son axe, à l’aide du pied. Ce grand disque
           ment ceux qui ne sont sensibles qu’aux    fait tourner avec rapidité un second disque
           attraits du dehors. Une faïence à vernis   plus petit, enfilé sur un axe qui est commun
           d’oxyde d’étain, résistant et salubre, sera   à l’un et à l’autre. C’est sur ce petit dis­
           toujours rejetée par la ménagère, en présence   que qu’est placée la pâte que l’ouvrier doit
           d’une poterie commune verte ou rouge, bien   façonner. Comprimant entre ses doigts la
           reluisante à l’œil. Cependant la première   terre molle et plastique pendant qu’elle
           sera d’un long usage, elle restera toujours   tourne avec rapidité sur le petit disque,
           sans odeur, et son emploi sera très-hygiéni­  la faisant saillir en dessus ou en dessous de
           que, tandis que l’autre, au bout de quelque   sa main, selon la forme qu’il veut lui don­
           temps, deviendra un objet de rebut et une   ner, allongeant ou rétrécissant le galbe du
           cause d’insalubrité.                      vase ou de l’objet quelconque qu’il modèle,
             Nous allons décrire la fabrication des po­  l’ouvrier potier arrive à façonner, en quel­
           teries communes, telle qu’elle s’exécute dans   ques minutes, l’argile au gré de son désir.
          le nord de la France, particulièrement chez   C’est un des spectacles les plus intéres­
          les potiers des environs de Paris.         sants à voir que cette terre obéissante,
             La pâte, qui sert à fabriquer les poteries   qui, sous les doigts de l’ouvrier , prend
          communes se compose d’un mélange de sa­    d’élégantes formes et semble recevoir la
          ble siliceux et d'argile plastique, que l’on   vie.
           extrait des terrains quaternaires, au sud de   La première opération que le potier exé­
          Paris, près des villages de Gentilly, d’Ac­  cute, quand il façonne un vase, s’appelle
          cueil, de Vanves, d’Issy, de Vaugirard. L’ar­  débauchage. Elle donne à l’objet une forme
          gile est la matière plastique, le sable la ma­  préparatoire.
           tière dégraissante.                         Une seconde opération, le tournassage, et
             Ces substances sont mêlées dans la pro­  qui s’accomplit sur un tour semblable, mais
          portion suivante :                         par les mains d’un autre ouvrier, doit sui­
                                                     vre débauchage.
                   Argile............................. 80  Le tournassage qui donne au vase d’ar­
                   Sable............................... 20  gile sa forme définitive, s’accomplit avec des
                                       100           poinçons, des ciseaux, etc. L’ouvrier fait
                                                     tourner le petit disque au moyen du grand,
             On mélange ces matières dans un tonneau,   mis en mouvement par son pied, et il pré­
           muni d’un agitateur en bois, semblable à   sente à la pièce déjà ébauchée par son compa­
           celui qu’emploient les briquetiers, ou tout   gnon, l’outil de métal qui doit modifier sa
           simplement par le marchage, c’est-à-dire en   forme primitive ou tracer sur sa surface
          malaxant avec les pieds les deux terres ad­  des lignes régulières.
          ditionnées d’une certaine quantité d’eau.    Pour tournasser la pièce, il faut qu’elle
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