Page 290 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                              285

          perfection de ses produits céramiques qui lui   guère remonter plus haut que le vuie siècle
          avait valu la dignité impériale, ou s’il se li­  de 1ère chrétienne. Nous avons dit enfin, ce
          vrait par goût à ce travail. Mais ce qu’elles   que les investigations faites depuis ont
          constatent, c’est que Chun fabriquait ses   prouvé, que M. Rosellini avait été victime
          poteries dans un lieu voisin du district actuel   d’une mystification de la part des Arabes
          de Thing-thao, dans la province de Chan-tong   qui lui avaient vendu ces bouteilles, les­
          (Canton).                                  quelles sont toutes modernes et aujourd’hui
             Le P. d'Entrecolles, supérieur des mis­  d’une fabrication courante.
          sionnaires en Chine, dont nous aurons à      11 est d’ailleurs facile d’expliquer l’erreur
           parler plusieurs fois, disait que de son temps   de ceux qui ont avancé que la porcelaine
           (en 1712), les Chinois payaient encore des   chinoise remonte jusqu’à 2000 ans avant
           sommes très-considérables pour des ustensi­  J.-C. La fabrication des terres cuites, qui
           les ayant appartenu à Chun et à Yas, deux   existait depuis si longtemps en Chine, a dû
           de leurs plus anciens empereurs, qui, tous   subir des perfectionnements successifs. Il
           les deux, avaient exercé l’art du potier. Les   se peut que du kaolin ait été mêlé acciden­
           auteurs chinois sont unanimement d’avis   tellement dans la pâte, et que les produits
           que les vases de terre cuite ont pris nais­  obtenus aient été plus ou moins translu­
           sance sous le règne de l’empereur Chun, et   cides. Plus tard on aura donné en Chine
           que ce sont les mêmes vases que, jusqu’aux   le nom chinois équivalent à celui de por­
           dynasties des Thsin et des Han (249-202   celaine à toutes les terres cuites, qu’elles
           avant J.-C.), on a continué à appeler Zh-   fussent translucides ou non. C’est là, d’ail­
           khi (vases de poterie).                   leurs, ce qu’on a vu en Europe. A l’époque
                                                     de la renaissance italienne, les poteries
             « Depuis l’an 2255 jusqu’à la dynastie des Han   vernissées s’appelaient porcelaines, et Passori
           (202 avant J.-C.), dit M. Stanislas Julien, les Chinois
           ne connaissaient que les vases en terre cuite, et la   nous dit qu’au moment où l’on connut la
           porcelaine n’était pas encore inventée. Ce fut seule­  porcelaine, les majoliques perdirent leur
           ment sous Han que la porcelaine prit naissance dans   premier nom, pour prendre celui de porce­
           le pays àeSin-ping...... H s’ensuit qu’on peut en pla­  laines.
           cer l’invention entre les années 185 avant et 87 après
           J. C. (I). »                                On peut donc admettre qu’il y a eu des
                                                     pseudo-porcelaines en Chine; mais il faut
             Cette affirmation si décisive de M. Stanislas   admettre aussi avec M. Stanislas Julien, que
           Julien n’est pas généralement acceptée.Nous   la véritable porcelaine n’a été découverte en
           avons parlé au commencement de cette No­  Chine, dans le pays de Sin-ping, qu’entre
           tice, des fameuses bouteilles en porcelaine   les années 185 avant J.-C. et 87 de notre
           de Rosellini et Wilkinson, trouvées dans   ère.
           les tombeaux de Thèbes (2) et auxquelles    Le moment est arrivé de dire ce qu’il faut
           on attribuait une origine remontant à dix-   entendre par véritable porcelaine.
           huit siècles avant J.-C. Mais nous avons
           ajouté que M. Julien avait démontré d’une   « La véritable porcelaine dure ou chinoise est ca­
           manière péremptoire, par les inscriptions   ractérisée, dit Alexandre Brongniart, par une pâte
                                                     fine, dure, translucide et une glaçure dure, terreuse,
           placées sur ces flacons, qu’ils ne peuvent
                                                     nommée couverte. La pfite est essentiellement com­
                                                     posée de deux éléments principaux : l’un argileux,
            (1) Histoire et fabrication de la porcelaine chinoise, ou­  infusible, c’est le kaolin, ou seul, ou associé soit
           vrage traduit du chinois, par M. Stanislas Julien, in-8",   avec de l’argile plastique, soit avec la magnésie;
           Paris, 1S5G, page xx. (Préface du traducteur.)  l’autre, aride, fusible, est donné par le feldspath ou
            (2) Page 174.                            d’au très minéraux précieux, tels que le sable siliceux,
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