Page 268 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                              263


          Chine, mais la porcelaine tendre artificielle,   tabourets de jardin, — des vases de phar­
          que la fabrique de Saint-Cloud ne produisit   macie ou de décoration,—des lampes d’église
          que quinze on vingt ans après cette époque.  et vases d’autel destinés à renfermer des
            Si la fabrication de la porcelaine tendre   fleurs, — des encriers, — des seaux à rafraî­
          fut essayée à Rouen, comme le veut L. Po­  chir, — des surtouts de table, — des pupitres
          tier, dès les premiers temps où l’on s’oc­  à écrire, — des bénitiers, — des bougeoirs,
          cupait d’imiter en France la porcelaine de   — des chandeliers, — des plateaux de ser­
          Chine, c’est-à-dire en 1673, ce ne fut là  vice, — des fontaines, — des plats à barbe,
          qu’un accident, qu’une tentative sans suite   — des lanternes, — des jardinières, — des
          sérieuse. La fabrication et le décor des faïen­  huiliers, — des petits souliers et des pan­
          ces suffisent à la gloire de la céramique   toufles, — des petites mangeoires pour les
          rouennaise.                               oiseaux, — des cruchons et brocs, — des
            Aux noms des Poterat il faut joindre,   flacons, — des tabatières, — des cartels de
          comme potiers célèbres de Rouen, Claude   montre, — des petits édifices, — des cadrans
          Borne, Dirioet Guillebeaud. On trouve dans   et méridiens solaires, — des crucifix, — des
          {'Histoire des faïences de Rouen de Louis   globes terrestres, — des statuettes, — des
          Potier, la liste détaillée des noms et des   coffrets, — des sucriers, — des lions et des
          ouvrages de ces fabricants. Nous renvoyons,   levrettes de jardin, — des braseros, — des
          pour ce point particulier, à cet ouvrage.  réchauds de table, etc., etc.
            La pâte de la faïence de Rouen est plus   Il est un trait important à noter dans
          épaisse que celle de Delft, mais ses orne­  l’histoire de la faïence de Rouen. Lorsqu’a-
          ments sont pleins de goût. Les décors sont  près les guerres de la succession d’Espagne,
          presque toujours peints en bleu ; les autres   le trésor de la France fut épuisé, Louis XIV,
          couleurs sont peu nombreuses et peu variées.   pour contribuer aux dépenses de l’armée,
          Rouen a fabriqué, il est vrai, des assiettes à   envoya toute son argenterie à l’hôtel de la
          fond bleu décorées quelquefois d’ornements   Monnaie, et il commanda un service de
          jaunes, mais le rouge fut toujours un écueil   faïence à Rouen, pour son usage personnel.
          pour ses artistes.                        Son exemple fut suivi par plusieurs grands
            La perfection du décor place la faïence   seigneurs de la cour, et c’est surtout de
          rouennaise au premier rang des œuvres ar­  cette époque, que date la prospérité de la
          tistiques de ce genre. Le goût français, avec   faïence rouennaise.
          sa régularité et sa pureté, brille dans ces   Les Mémoires de Saint-Simon parlent des
          produits, et leur imprime un cachet national   seigneurs et des bourgeois «qui se mettaient
          impossible à méconnaître. De simples as­  à la faïence. » Cela veut dire que l’on re­
          siettes destinées aux usages domestiques et   nonça, à cette époque, au luxe de l’argen­
          qui se vendaient autrefois à très-bas prix,   terie, pour adopter l’usage des belles faïences
          sont de véritables chefs-d’œuvre.         rouennaises.
            La faïence de Rouen a produit des ouvrages   Après avoir raconté que quelques hauts pe r-
          innombrables. Outre la vaisselle de table,   sonnagés, pour faire leur cour à Louis XIV,
          simple ou ornée, outre les soupières et les   envoyèrent leur argenterie à la Monnaie,
          grands plats, il faut citer des bustes, — des   Saint-Simon ajoute :
          poêles,— des gaines et consoles, — des cham­
                                                      « Tout ce qu’il y eut de grand et de considérable
          branles de cheminée, — des tableaux déco­
                                                   j se mit en huit jours à la faïence. Ils en épuisèrent
          ratifs composés de carreaux peints, — des
                                                    les boutiques, et mirent le feu à cette marchandise,
          vases de jardin et des vases à fleurs, — des   tandis que tout le médiocre continua à se servir
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