Page 264 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES. 259
mérite artistique de ces poteries laissait à Une autre famille étrangère parut dans
désirer; mais quelques-unes étaient excel l’industrie de la faïence nivernaise,vers 1632 :
lentes au point de vue de la fabrication. les Custode, qui sont d’origine italienne
Les plus anciennes fabriques de faïence, comme les Conrade. Pierre Custode fonda à
en France, sont celles de Nevers. Leur créa Nevers la manufacture dite de Y Autruche, et
tion remonte à la fin du xvie siècle. On lit ses descendants ont continué la fabrication
dans un ouvrage de Diderot : jusqu’au commencement de notre siècle.
C’est dans la fabrique de l’Autruche, située
« La première fabrique de faïence fut fondée à
Nevers, par un Italien, qui ayant accompagné en rue Saint-Genest, qu’a travaillé l’artiste ita
France un duc de Nivernais, aperçut en se prome lien Ristori.
nant aux environs de Nevers, une terre de l’espèce Nous trouvons dans un ouvrage spécial
dont on faisait de la faïence en Italie. 11 la prépara sur la faïence de Nevers, la Faïence, les faïen
et fit construire un petit four où fut fabriquée cette
faïence. Des artistes italiens, attirés par le premier ciers et les émailleurs de Nevers, publié par
succès, s’établirent bientôt dans les environs, et fu un amateur nivernais, Du Broc de Ségange,
rent protégés par la cour et la noblesse qui com en un beau volume orné de planches colo
mençait à prendre goût à la vaisselle en terre cuite,
d’après la mode déjà répandue en Italie. » riées (1), les noms des fabricants les plus
renommés venus après les Conrade et les
Ce duc de Nivernais était Louis de Gon Custode. Il n’est pas inutile de rapporter
zague, qui était devenu duc de Nevers par ces noms, car la faïence de Nevers, aujour
son mariage avec Henriette de Clèves (1562), d’hui fort à la mode, est très-recherchée
l’une des Trois Grâces de la cour de Char par les amateurs et collectionneurs.
les IX. Voici le nom des fabricants nivernais dont
La majolique aurait donc été introduite les marques sont les plus estimées :
dans le Nivernais avant 1590. Ce fait est Denis Leserre, contemporain de Con
mis hors de doute par la dédicace d’un rade, auteur d’une pièce célèbre, la Vierge
livre à Louis de Gonzague, aux calendes d'a offrant une pomme à l’enfant Jésus; — Ni
vril 1590, dans laquelle l’auteur dit que l’in colas Viodé, qui travaillait vers 1678, et
troduction de la fabrication de la faïence à qui était fils de Claude Viodé; — Henri
Nevers (figulinœ encausticœ) est une des plus Borne, mort en 1716 et qui fabriquait sur
puissantes raisons qui aient pu l’engager à tout des statuettes en faïence ; — Henri de
dédier son livre au protecteur et au bienfai Selle, mort en 1710; —Guilleraut, mort
teur de Nevers. en 1650 ; — François Rodrigue, dit Duples
Parmi les premiers artistes de Nevers, sis (1734); — Jacques Seigne; —François
on cite les Conrade, gentilshommes italiens, Haly, mort en 1782. Ces noms sont les der
de Savone. Voici l’extrait d’un brevet oc niers de la grande fabrication nivernaise;
troyé à Antoine de Conrade, par Louis XIV car en 1790, ainsi qu’il résulte d’une péti
et la régente, sa mère, qui prouve qu’on était tion adressée au roi par les faïenciers de
bien convaincu que ces habiles potiers pos Nevers, il n’existait plus dans cette ville que
sédaient des secrets que le public devait deux fabriques de faïence.
ignorer. M. Demmin, auteur de l’ouvrage Guide
de Jamateur, que nous citons souvent, divise
« Estant bien informé de son industrie et grande
expérience à faire toutes sortes de vaisseaux de en quatre époques la fabrication de la faïence
faïence, par une science rare et particulière, ré de Nevers :
servée secrètement de père en fils en lu maison de Con
rade, etc. » (1, In-i, Nevers, 1863, édité par la Société nivernaise.