Page 267 - Les merveilles de l'industrie T1
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262                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                       Beauvoisis fournissaient non-seulement la   François Ier avait établi à Rouen une ma­
                       France, mais encore l’Angleterre et les   nufacture de poteries et terres cuites qui de­
                       Pays-Bas.                                 vint très-célèbre, à la fin du xvn" siècle. Des
                         Les poteries de Beauvais étaient plutôt   artistes italiens y exécutèrent, dans le cou­
                       des terres cuites vernissées, que des faïen­  rant du xvie siècle, des œuvres architectura­
                       ces émaillées. On y produisit des faïen­  les remarquables, au point de vue de la cé­
                       ces quand cette poterie devint à la mode en   ramique. Nous citerons entre autres, deux
                       France. On voit dans le Musée de Sèvres   tableaux peints sur des carreaux de revête­
                       une gourde plate de la fabrique de Beau­  ment, qui appartiennent au duc d’Aumale.
                       vais, portant sur chaque face, les armes de   Cette poterie émaillée qui, à tort, a été at­
                       France. Elle fut trouvée dans la Somme.   tribuée à Bernard Palissy, couvre une sur­
                       D’après la forme de la fleur de lis et des   face de l“,60 de hauteur sur i",90 de lar­
                       lettres gothiques de l’inscription « Charle-   geur, au moyen de 238 carreaux renfermés
                       Roy », Brongniart attribue cette pièce    dans un cadre. L’un de ces carreaux repré­
                       au règne de Charles VIII (1483-1498). Mais   sente Curtius, l’autre Mucius Scævola, avec
                       dans une collection particulière, celle de   les armes des Montmorency. C’est du château
                       M. de la Chesnevaye, on trouve un plat    des Montmorency à Ecouen que provient
                       authentiquement de Beauvais qui doit être   ce chef-d’œuvre, qui porte l’inscription :
                       antérieur, et où on lit en caractères go­           Fait à Rouen en 1542.
                       thiques minuscules, en usage pendant le
                       xive et le xve siècle :                     Le chef-d’œuvre du château d’Ecouen ne
                                                                 saurait être de la faïence proprement dite,
                          Santé sans argent, ça donne maladie.
                                                                 car l’établissement des premières faïence­
                         Enfin nous citerons un grand plat que   ries à Rouen ne remonte pas au delà de
                       nous représentons ici (fig. 202) et qui existe à   1644.
                       la Bibliothèque de la rue de Richelieu, dans   C’est Nicolas Poirel, sieur de Granval, qui
                       la salle des Antiques et du Moyen âge. Long   obtint, en 1644, un privilège du roi pour la
                       de 43 centimètres, il est en terre cuite, à   création d’une fabrique de faïence à Rouen.
                       pâte assez fine, assez blanche même, ayant   D’autres lettres patentes, en date de 1673,
                       plusieurs des qualités de la pâte de faïence   furent accordées à Edme Poterat, à qui
                       fine et enduit intérieurement d’un vernis de   Poirel de Granval avait cédé son privilège.
                       cuivre, à la manière des poteries de Nurem­  Edme Poterat et Louis Poterat, son fils,
                       berg. Il est couvert d’ornements en relief   sont les auteurs des plus belles faïences
                       de toute sorte, notamment des armoiries de   françaises. De leur fabrique de Rouen sont
                       France et de Bretagne du temps de Char­   sorties les œuvres qui sont aujourd’hui les
                       les VIIIe, avec les instruments delà passion,   plus recherchées des amateurs. Louis Po­
                       et ce qui intéresse particulièrement, il porte   terat ne produisit pas seulement la faïence.
                       la date de 1511.                          D’après un privilège du roi, en date de 1673,
                                                                 cité par M. Louis Potier, dans sa remarquable
                         Nous aurions encore à parler des terres   Histoire des faïences de Rouen (1), Louis Po­
                       cuites, émaillées ou vernissées, d’Avignon,   terat aurait fabriqué, le premier en France,
                       de celles d’Agen et de Saint-Cloud ; mais   de la porcelaine, non la porcelaine dure de
                       nous avons hâte d’arriver à celles de Rouen,
                       les plus remarquables et les plus justement   (1) Histoire des faïences de Rouen, par L. Potier, œuvre
                                                                 posthume publiée par l’abbé Colas, 1 vol. in-4°, avec atlas
                       estimées de la faïencerie française.      de planches coloriées, page 81. Rouen, 1870.
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