Page 236 - Les merveilles de l'industrie T1
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POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                              231



































                                       Fig 185. — Coupes gauloises.


          « Le Grec seul pouvait fraterniser avec le Celte : i  rustiques figurines eut tant de peine à reconstituer
        les deux grands vaincus se reconnurent et se tendi­  au xvne siècle.
        rent une main loyale. Aux écoles de Marseille, de   « A Arles, ils inventèrent ces hanaps à fond vert
        Lyon, d’Autun, de Bordeaux, les lettres grecques,   agrémentés d’ornements en barbotine en forme de
        tant était barbare cette pauvre race si calomniée,   graines de pin, vernis de même sorte.
        devinrent bientôt florissantes.              «A Orange, ils s’essayèrent à des marbrures d’une
          « Le flambeau de la philosophie d’Athènes, comme   ingéniosité sans pareille. A Reims, dans les Ar­
        dit Juvénal, éclaira l’univers. Le Breton lui-même   dennes, et jusque sur les bords du Rhin, ils revin­
        reçut du Gaulois des leçons d’éloquence, et l’on   rent aux procédés antiques, laissant de côté tout le
        parla jusqu’à Thulé d’y gager un rhéteur.  système italien, et jetant avec l’humour et la fantaisie
          « La lumière d’Orient renaissait au milieu de   naturelle à leur caractère, leurs pointillés si gra­
        l’obscurité latine. Elle éclata de nouveau, brillante,   cieux, leurs guirlandes si délicates sur le rebord des
        admirable, étonnante en Gaule. A Bourbon-Lancy   vases ou sur la panse de leurs petites tasses.
        (Saône-et-Loire), on élevait à un peintre grec une   « Le propre du soi-disant art romain était le
        stèle funéraire.                           moulage ; la marque unique de l'art gaulois,
          « Les femmes écoutaient docilement les conseils   c’est la liberté de l’ébauchoir et du pinceau (1). »
        de ces artistes au doux parler, et comme elles,
        comme autrefois pour les grandes druidesses, l’art   Nous donnons comme spécimens de cette
        s’infiltrait doucement dans nos mœurs simples et   dernière époque de l’art gaulois (fig. 185)
        naïves (t).                                des coupes de terre rouge de grandeurs dif­
          « Quelles délicieuses coupes façonnaient alors les
                                                   férentes, avec ornements en relief et feuil­
        ouvriers de l’art de terre !
          « A Dijon, ils tournèrent ces vases élégants, ornés   lages de plantes aquatiques sur le rebord. Le
        de feuilles légères, munis d’anses délicates qu’ils sa­  plus petit est muni d’anses très-élégantes.
        vaient revêtir de cette introuvable couverte, de ce
                                                     Ces vases proviennent de Cologne et de
         vernis métallique, de cet émail que l’auteur des
                                                   Clermont et font partie de la collection de
          (1) On a trouvé dans la villa de Saint-Médard-des-Prés, le
         tombeau d’une femme, peintre du me siècle, à côté de la­  (1) De la poterie gauloise. Étude sur la collection Char-
         quelle on avait enseveli tous les instruments de son art.   vet, in-8°, Paris, 1872, p. 203.
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