Page 135 - Les merveilles de l'industrie T1
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130                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


           de toutes parts dans une masse de cristal   L’art de réduire le verre en fils plus dé­
           transparent, qui les laisse apercevoir à sa   liés qu’un cheveu, et de tresser des objets
           base.                                    I d’art, qui se vendaient à des prix fabuleux,
              Pour donner au presse-papiers sa forme  . florissait en Europe à l’époque de la Re­
           exactement demi-sphérique, on le réchauffe   naissance. On obtenait ces fils de verre blanc
           à Y ouvreau, et avec une spatule concave de   ou de couleur, en étirant à la lampe d’é-
            bois humectée d’eau, on lui donne sa forme   mailleur un tube de verre, blanc ou coloré.
           définitive. Il n’y a plus qu’à le porter dans le   Quand le tube était ramolli par le feu , le
            four à recuire.                           fileur de verre l’étirait en un fil d’un mètre
              Par le même moyen, mais sans employer   environ, en tenant une des extrémités avec
            de tubes émaillés, on prépare des serre-pa­  une petite pince. Ensuite il attachait la petite
            piers qui contiennent à leur base des photogra­  pince à laquelle était fixé le bout du verre
            phies sur émail, par conséquent inaltérables   un peu étiré, à une petite roue en tôle, mise
            au feu, ainsi que des bas-reliefs galvanoplas-   en mouvement par un homme. Alors, le
            tiques, argentés, qui n’ont rien à craindre,   tube étant toujours maintenu au rouge par
            par conséquent, de la chaleur qu’ils doivent   son extrémité placée dans la flamme de la
            subir par le contact du cristal ramolli par le   lampe d’émailleur, et la roue tournant tou­
            feu.                                      jours, le tube continuait d’être étiré, filé.
              On fait aussi des serre-papiers en cristal,   Les fils de verre ainsi formés s’enroulaient
            contenant des corps qui ne supporteraient   autour de la gorge de la roue, comme le co­
            pas l’action de la chaleur, tels que des mon­  ton s’enroule sur un écheveau. Rien de plus
            tres, des thermomètres, etc.; mais le procédé   curieux que cette opération, dans laquelle on
            est ici tout différent. L’objet altérable par   voit le verre, filé comme le chanvre ou la
            la chaleur, et’ qui ne pourrait sans se dé­  laine, produire des fils d’une prodigieuse
            truire être mis en contact avec le cristal   finesse et d’une longueur indéterminée.
            brûlant, est simplement logé dans une cavité   Avec ces fils de verre on peut faire de vé­
            que l’on a ménagée en taillant exprès le   ritables tissus. On entrelace ensemble des fils
            dessous de la masse du cristal. A cet effet le   de soie et de verre, et l’on obtient des étoffes
            support du presse-papiers est composé d’un   dont les reflets sont chatoyants au plus haut
            morceau de carton ou de bois, sur lequel   degré.
            repose l’objet que le cristal enveloppe.    C’est avec les mêmes fils de verre que
              Il ne faut pas confondre ce dernier et   l’on obtient ces aigrettes fines, souples, dé­
            grossier artifice avec celui des véritables   liées, que les dames plaçaient autrefois dans
            presse-papiers à l’italienne. Nos artistes fran­  leurs cheveux ou sur leurs chapeaux ; et
            çais qui ont emprunté ce dernier produit   même ces perruques, grises ou noires, que
            aux anciens Vénitiens, l’ont porté à un véri­  l’on trouve encore dans quelques cabinets de
            table degré de perfection.                curiosités, et qui avaient cela d’extraordi­
                                                      naire, qu’on les frisait au fer, comme les
               Verre filé.,   ■es millefiori, autrefois in-   cheveux naturels !
            connus ei^      ce, sont devenus, de nos     C’est avec le verre filé que l’on fabriqua
            jours, à fl     i, au contraire le verre filé,  autrefois, en Italie, des chefs d’œuvre d’art
            une de^grandes curiosités des deux derniers   et de peinture qui existent encore dans les
            siècles, a perdu toute faveur, et ne se voit   musées et les galeries, et qui font l’admira­
            pdus maintenant que chez les marchands de   tion des touristes et des visiteurs. Tel était,
            curiosités.                                par exemple, le petit vaisseau de verre filé et
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