Page 133 - Les merveilles de l'industrie T1
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128                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


             donne l'émail, c’est-à-dire le silicate d'étain,   cle. Bientôt on imita, en Bohème, ces vases
             substance opaque et très-fusible, dont les   de verre à dessins colorés intérieurs. De
             emplois sont immenses dans l’industrie gé­  nos jours, M. Bontemps a doté l’industrie
             nérale des poteries.                      française de ces produits, en en fabriquant
               La préparation des émaux est tout un art   de grandes quantités, et faisant connaître
             dont nous ne pourrons signaler ici que les   avec beaucoup de libéralité tous les détails
             principes généraux.                       des opérations, que les ouvriers vénitiens
                                                       et bohèmes avaient si longtemps tenus
               « L’émail, dit M. Péligot, dans ses Leçons sur la
                                                       secrets.
             verrez le (1), est un verre très-plombeux, très-fusible,
             il est employé pour recouvrir les plaques de cuivre   Voici comment se fabriquent les objets
             ou de fer, pour les cadrans de pendule et de montre ;   de verre ornés de dessins intérieurs nommés
             on en fait des tubes, des perles, etc. ; il entre dans
                                                       filigranes, en France, millefiori en Italie,
             la fabrication des verres doublés ou triplés. Les abat-
             jour des lampes sont ordinairement en cristal dou­  reticulated en anglais, gesponenes en alle­
             blé d’émail.                              mand.
               « On s’en sert également pour émailler la poterie   On commence par préparer un assorti­
             de fer.
               « L’un des procédés pour préparer l’émail consiste   ment varié de tubes pleins en cristal coloré
             à faire brûler à l’air un alliage formé de 15 parties  et en émail, tubes pleins qui contiennent, à
             d’étain et de 100 de plomb. On obtient ainsi une   l’intérieur, un dessin régulier. Supposons,
             sorte de potée d’étain qu’on pulvérise, qu’on délaye   par exemple, que l’on veuille faire un tube
             dans l’eau, et dont on recueille, par décantation,
                                                       bleu en émail, et que l’on désire que la sec­
             les parties les plus ténues : c’est ce qu’on appelle la
             calcine.                                  tion de ce tube représente une étoile blanche.
               « On fond dans un creuset 200 parties de calcine   On prend un moule plat en fonte, dans le­
             avec 100 de sable et 80 de potasse purifiée.
               « Voici l’analyse de trois échaniillons d’émail :  quel on a gravé en creux une étoile. On fait
                                                       tomber dans le creux de ce moule, préala­
                                   i.     2.   3.      blement chauffé, une petite quantité d’émail
                Silice........................... 31,6  36,0   30,0
                Potasse........................ 8,3  6,0   20,0  blanc, qui remplit le creux et prend la forme
                Oxyde de plomb.»... 50,3  53,0   40,0  de l’étoile. Alors on retire le tout du moule.
                Oxyde d’étain.............   9,8  2,0   10,0
                Acide arsénique.........    »  3,0   »  Sur cet émail blanc représentant une étoile,
                                 100 »  100,0   100 »  on applique une masse de verre ou de cristal
                                                       bleu, et de cette manière l’étoile d’émail blanc
               « Voici en outre la composition d’un mélange d'é­
             mail et de fondants pour les cadrans de pendules.   est englobée au milieu d’une masse de cris­
             On prend :                                tal bleu.
                                                         Cette espèce de cylindre bleu contenant
                 Émail blanc (échantillon n° 3)................. 44
                 Sable blanc............. ..................................  25  l’étoile blanche au centre , est réchauffé à
                Minium.....................................     25  l’ouvreau du four, roulé sur le marbre, en
                Nitre......................................   4
                Cristal ordinaire........................................ 4  un cylindre bien régulier, et enfin étiré en
                                                       un long tube.
                                               100 »
                                                         Pour étirer ce cylindre en tube, deux
               Verres filigranes et rubanés. — Les objets
                                                       ouvriers appliquant chacun un pontil à
             en verre présentant à l’intérieur des dessins,
                                                       chaque extrémité du cylindre, s’éloignent
             des lignes de différentes couleurs, qui al­
                                                       rapidement. Le cylindre se trouve à l’ins­
             ternent régulièrement entre eux, furent long­
             temps le privilège des verriers de .Venise.   tant changé en un tube de 10 à 15 mè­
             Cette industrie florissait           10-  tres de longueur. Seulement ce tube n’est
                                                       pas creux, comme ceux que l’on produit
              (1) Annales du Conservatoire des    537.  dans les verreries pour l’usage des labora-
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