Page 144 - Histoire de France essentielle
P. 144

Lectures.               — 136 —      LA FRANCE INTELLECTUELLE

              70e Lecture. — La misère en France'au dix-huitième siècle.
                Parcourez les correspondances administratives des trente dernières
              années qui précèdent la Révolution ; cent indices vous révéleront une
              souffrance excessive. Visiblement, pour l’homme du peuple, paysan,
              artisan, ouvrier, qui subsiste par le travail de ses bras, la vie est pré­
              caire; il a juste ce qu’il faut pour ne pas mourir de faim, et plus d’une
              fois ce peu lui manque. Dans un canton reculé, les paysans coupent
              les blés encore verts et les font sécher au four parce que leur faim ne
              peut attendre. L'intendant de Bourges marque qu’un grand nombre
              de métayers ont vendu leurs meubles ; que des'familles entières ont
              passé deux jours sans manger ; que dans plusieurs paroisses les affamés
              restent au lit la plus grande partie du jour pour souffrir moins. L’in­
              tendant d’Orléans annonce qu’en Sologne de pauvres veuves ont brûlé
              leur bois de lit, d’autres leurs arbres fruitiers, pour se préserver du
              froid, et il ajoute : «Rien n’est exagéré dans ce tableau, le cri du
              besoin ne peut se rendre, il faut voir de près la misère des campagnes
              pour s’en faire une idée. »               (Taine.)
                          71® Lecture. — Histoire du peuple.
                Si on rapproche par la pensée les deux bouts de . notre histoire, le
              serf d’autrefois et le citoyen d'aujourd'hui, [quelle distance, quelle diffé­
              rence entre ces deux hommes dont l’un n’avait rien, ", pas même sa
              personne, et dont l’autre ne dépend que de lui-même.
                G’esl par le travail, par l’économie, par la patience, par le courage
              que cette classe si longtemps malheureuse et asservie est arrivée de la
              pauvreté, de l’ignorance, de la servitude, à l’aisance, à l’instruction et
              à la liberté. C'est l’association qui a tiré le peuple de l’isolement du
              servage et l’a constitué en commune; c’est le courage qui lui a fait;sa
              place dans les armées à côté de la noblesse; c’est la fermeté qui lui a
              ouvert les États généraux; c’est la loyauté et la fidélité qui lui ont
              assuré l’appui du pouvoir royal ; c’est l’intelligence qui l’a fait arriver
              aux hauts emplois et jusque dans les conseils de la royauté ; c’est l’acti­
              vité, c’est l'initiative qui, par le commerce et l'industrie, l’ont conduit
              à l’indépendance. Elle moment venu, quand la royauté se fut affaiblie
              par l’abus même de sa puissance, alors, à l'aide de ce peuple mûri,
              fortifié,ennobli, un grand mouvement se fit, le trône tomba, laroyauté
              disparut et le peuple régna.            (Vessiot.)

                Questionnaire, — 1. Parlez de l’éveil de l’opinion publique. — 2. Dites ce
              que vous savez sur Voltaire, Montesquieu, J.-J. Rousseau. — 3. Parlez de la
              réhabilitation de Calas. — 4. Nommez les grands savants du XVIIIe siècle.—
              5.  Les pnilanthropes. — 6. Montrez comment, malgré les hontes du gouver­
              nement, le xviiic siècle tient une belle place dans l’histoire.
   139   140   141   142   143   144   145   146   147   148   149