Page 691 - Les merveilles de l'industrie T1
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LE SOUFRE ET L’ACIDE SULFURIQUE.                             G87


          cidentels. D’après leurs calculs, l’eau de la   la mer. Comment se fait-ii que la vapeur se
          mer pénétrant à une profondeur de 15 kilo­  promène sous les assises du sol et les soulève
          mètres au-dessous de la surface du sol, y   en un dôme volcanique, alors qu’elle pour­
         trouverait une température suffisante pour   rait simplement, par l’effet de la pression,
         que la vapeur et les gaz résultant de la dé­  remonter par le même chemin que l’eau li­
          composition de cette eau salée, aient une   quide a suivi pour descendre en ce point?
          force de 1500 atmosphères. Cette tension   Cette objection étant restée jusqu’à ce mo­
          serait assez énergique pour soulever les as­  ment sans réponse, il est difficile d’accorder
          sises terrestres ou liquides qui les surmon­  une entière adhésion au système nouveau
         tent, et pour chasser au dehors d’immenses   d’explication du phénomène des volcans
          colonnes de vapeur d’eau et de gaz. C’est   fourni par la physique et la mécanique.
          par cette pression que les laves liquides ou
          pâteuses pourraient s’élever au niveau du   Voilà donc ce qui se passe dans un volcan
          sol et couler à sa surface, mêlées à des tor­  en activité. Quand un volcan, par une cause
          rents de vapeur d’eau.                    quelconque, ne donne plus d’éruptions,
            Faisons remarquer que si cette théorie   quand son cratère est fermé, on a un volcan
          était l’expression de la vérité, le soufre que   éteint. Cependant, bien que les phénomènes
          les volcans rejettent à l’état d’acide sulfhy-   éruptifs aient totalement disparu, l’action
          drique, proviendrait des sulfates (sulfates de   volcanique continue sourdement au-dessous
          magnésie, de soude et de chaux) qui sont   du cratère obstrué. Il se dégage toujours
          contenus dans l’eau de la mer. Ce sont ces   dans ces canaux souterrains, des gaz azote,
          sulfates qui, décomposés au sein de la terre,   acide carbonique et hydrogène sulfuré. Les
          par l’excessive élévation de température,   émanations d’hydrogène sulfuré arrivent au
          se transformeraient en hydrogène sulfuré.   bord du cratère formé, c’est-à-dire non loin
          Ainsi la mer qui fournit à l’industrie la   de la surface de la terre, et, de là, l’hydro­
          soude, lui fournirait également le soufre, par   gène sulfuré passe dans l’air, où il est
          la voie détournée de l’action volcanique.  bientôt oxydé ou brûlé par l’oxygène. De
            Cette théorie compte aujourd’hui beau­  cette oxydation résultent de l’eau et de l’a­
          coup de partisans. Toutefois, nous restons,   cide sulfureux. Ensuite, par une réaction
          pour le moment du moins, fidèle à l’an­   chimique très-curieusè, que nous allons ex­
          cienne théorie, c’est-à-dire a l’hypothèse de   pliquer, l’hydrogène sulfuré et l’acide sul­
          la communication qui peut s’établir entre   fureux réagissent l’un sur l’autre et donnent
          la matière liquide qui occupe l’intérieur du   naissance, par cette réaction mutuelle, à
          globe et la surface du sol. Il est, en effet,   de l’eau et à un dépôt de soufre.
          une objection, à laquelle n’ont pas encore   On fait souvent, dans les cours de chimie,
          répondu les partisans de la nouvelle théorie   l’expérience suivante. On prend deux volu­
          des volcans. On se demande pourquoi la    mes à peu près égaux de gaz hydrogène sul­
          vapeur d’eau et les gaz portés à une pro­  furé et acide sulfureux, et en mélangeant
          digieuse température et animés d’une ten­  ces deux gaz, on obtient aussitôt un dépôt de
          sion énorme, au lieu de soulever les roches   soufre et d’eau. La cloche dans laquelle on
          qui les surmontent, et de fracturer l’écorce   fait l’expérience, se recouvre d’un dépôt
          solide du globe, ne remonteraient pas pu­  blanchâtre de soufre, et l’eau ruisselle sur
          rement et simplement vers la mer, par le   ses parois.
          même canal qui établit la communication     L’équation chimique suivante explique
          entre l’intérieur de la terre et le bassin de   cette réaction :
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