Page 550 - Les merveilles de l'industrie T1
P. 550
546 MERVEILLES DE L’INDESTRIE.
point la santé des ouvriers, qui n’y passent merveilles naturelles du globe. Pas un
d’ailleurs, que huit heures par jour. Les touriste ne traverse la Gallicic sans les visi
chevaux qu’on emploie pour manœuvrer le ter. Si le lecteur veut nous suivre, nous
manège, y demeurent jusqu’à ce qu'ils ne allons entreprendre avec lui celte excursion,
puissent plus travailler; alors on les hisse d’après les récits des naturalistes et des
au jour, la lumière les aveugle et c’est leur fin. voyageurs qui nous ont transmis le résultat
Le nombre des ouvriers employés aujour de leurs remarques ou de leurs impressions.
d'hui dans les mines de Wieliska est de 700 Nous invoquerons d’abord le témoignage
à 800, et celui des chevaux de 400. Les frais du naturaliste Beudant. Dans son Voyage
de main-d’œuvre ne s’élèvent jamais à plus en Hongrie, publié en 1821, Beudant a fait
de 3 francs pour 100 kilogrammes do sel, une description intéressante des salines de
dont le prix varie de 6 à 12 francs les 100 Wieliska.
kilogrammes. Au lieu de descendre dans les mines par
Les ouvriers travaillent à la lueur des l’escalier tournant construit par Auguste III,
lampes. Ils se servent, pour détacher le sel, dans le puits dit de Lezo, Beudant descen
de pioches, de ciseaux et de maillets. On dit par le puits de Danielowilz, c’est-à-dire
enlève souvent des masses de sel en prismes par le grand puits d’extraction, parce qu’on
carrés de 2 à 3 mètres de côté, et do près arrive plus tôt par cette voie que par l’esca
d’un mètre d’épaisseur. On est quelquefois lier. Ce puits a 3 mètres de diamètre à son
parvenu à en détacher qui avaient 40 mè ouverture, mais il s’élargit considérable
tres et même 45 mètres de longueur. Les ment à sa partie inférieure; il a.64 mètres
ouvriers s’acquittent de leur travail avec de profondeur jusqu’à la première galerie.
assez de facilité. Par le son que rendent Arrivé là, on descend dans la mine au
les masses, ils connaissent le moment où moyen de larges escaliers.
elles vont se détacher; et alors ils pour La manière dont on descend dans ce puits
voient à leur sûreté. Les blocs se roulent d’extraction, est d’ailleurs assez effrayante
sur des cylindres de bois, jusqu’aux points dans sa simplicité. Beudant la décrit en ces
qui descendent dans les galeries. Là, ils sont termes :
élevés par des manèges tournes par douze
à quinze chevaux. Quant aux petits mor « Dans nombre déminés que j’ai visitées, j’étais
souvent descendu assis ou debout sur le bord de la
ceaux, on les met dans des tonneaux, et on tonne aux minerais, tenant d’une main un câble et
les roule jusqu’au bas du puits d’extraction. de l’autre une lampe. Celle méthode peut déjà pa
On a fait des excavations si prodigieuses raître assez effrayante aux personnes qui n’y sont
pas habituées; mais celle de Wieliska ne l’est guère
dans le fond de ces mines, pour en retirer
moins, et, de plus, elle est assez singulière. On at
le sel, qu’on y voit des cavités qui seraient tache à un nœud du câble un certain nombre de
assez vastes pour contenir plusieurs milliers cordes, suivant le nombre des personnes qui doivent
descendre. Chaque corde, pliée en deux, comme
d’hommes. Ces cavernes immenses servent
une balançoire, porte dans le bas une petite sangle
de magasins pour les tonneaux et d’écuries qui doit servir de siège, et une autre qui forme un
pour les chevaux. petit dossier; il en résulte une espèce de petit fau
teuil aérien, sur lequel on se place. Pour s’y
On trouve quelquefois des creux qui sont
asseoir, on tire une corde au bord du puits, et lors
remplis d’eaux chargées de sel. Lorsqu’on a qu’on y est bien arrangé, on laisse la masse re
épuisé ces eaux, les parois de ces cavités res prendre la verticale; on reste alors suspendu au
tent tapissées de cristaux qui présentent milieu du gouffre jusqu’à ce que tout le monde se
soit placé; il en résulte un paquet d’hommes en
l’aspect le plus curieux.
manière de lustre, qui est d’autant plus singulier,
Les mines de sel de Wieliska sont une des que chacun porte une bougie à la main. S’il y a un
•ff’