Page 518 - Les merveilles de l'industrie T1
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514                  MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


                        Nous représentons dans la figure 340, la   Les fougères, la bruyère, les fruits du
                      combustion des bois dans une forêt d’Amé­  marronnier d’Inde, les genêts, les chardons,
                     rique. A mesure que la niasse s’affaisse par   peuvent également être employés avec avan­
                     les progrès de la combustion, on jette de   tage pour la production de la potasse. Ajou­
                     nouvelles branches sur le bûcher. Cette   tons à cette liste le marc d’olives (grignon)
                     opération se prolonge souvent pendant six   qui est le résidu du pressurage des olives et
                     ou sept jours, selon la quantité d’arbres dont   se compose du noyau écrasé et du paren­
                     on peut disposer, et c’est un spectacle bien   chyme sec.
                     étrange que ce gigantesque brasier entre­    Kirwan et Berthier ont donné le tableau
                     tenu jour et nuit par des hommes à demi   du produit que donnent en cendres des
                     nus, dans une forêt. C’est comme l’enfer   arbres d’espèces diverses. Voici le résumé
                     transporté au sein des beautés et de la tran­  de leurs recherches :
                     quillité de la nature.                      100 kilogrammes de bois de chêne, de
                       La composition des cendres provenant de   hêtre, de charme, de tremble (troncs et
                     cette combustion varie, non-seulement se­  branches) rendent environ 1 kilogramme 1/2
                     lon l’âge et les espèces des végétaux inciné­  de cendres, d’où l’on extrait de 150 à 200 gr.
                     rés, mais encore d’après le sol où ils ont   de salin de potasse. Les sureaux, faux ébé-
                     vécu. Les cendres provenant d’arbres pris   niers, mûriers, noisetiers, donnent 2 à 4 kil.
                     non loin des bords de la mer, des lacs    de cendres, et 400 à 500 grammes de salin.
                     salés ou dans le xroisinage de mines de sel   Les fanes de pommes de terre, de sarrasin,
                     gemme, ressemblent à celles qui proviennent   de colza, de pavot, les orties, chardons,
                     des plantes marines, parce que le sol sur   etc., donnent 5 à 10 kilogrammes de po­
                     lequel ces arbres ont vécu renferme du chlo­  tasse.
                     rure de sodium. Aussi la potasse qui en pro­
                     vient est-elle plus ou moins mélangée de    Pour retirer des cendres le carbonate de
                     soude.                                    potasse qu’elles contiennent, on les soumet
                       Les parties plus jeunes d’un arbre don­  à l’opération du lessivage.
                     nent plus de potasse que les vieilles; les   . On dispose à la suite les uns des autres,
                     tiges en donnent moins que les branches, et   des cuviers en bois ou en fonte, par séries
                     les plantes herbacées en produisent plus   de 10. Dans les usines, ces séries sont con­
                     que les plantes ligneuses. Les écorces four­  nues sous le nom de bandes. Chaque cuvier,
                     nissent de cinq à dix fois plus de cendres   qui est de la capacité de 8 à 10 hectolitres,
                     que le bois; par contre, ces cendres sont   reçoit une charge de 6 à 8 hectolitres de
                     moins riches en potasse.                  cendfes, qu’on tasse légèrement, et sur la­
                       Le chimiste Chaptal, qui s’était beaucoup   quelle on verse de l’eau froide, ou chaude,
                     occupé de l’étude des potasses, a constaté   de manière que l’eau surnage les cendres.
                     que les cendres de certaines plantes pota­  Chaque cuvier est muni d’un double
                     gères, telles que les tiges de haricots, de   fond de paille, qui fait l’office de filtre
                    fèves de marais, de melons, de concombres,   et de robinet. Douze heures après qu’on
                     de choux, d’artichauts, etc., sont très-riches   a déversé l’eau sur les cendres, cette eau,
                     en potasse. Les feuilles et les nervures de   filtrant à travers leur masse, a emporté
                    tabac provenant de l’écôtage dans les manu­  les sels solubles qu’elles renfermaient.
                     factures, les tiges de tournesol, de maïs,   On ouvre alors les robinets et on recueille
                     de pommes de terre, donnent également     la lessive. Cette lessive est déversée dans le
                     des cendres très-chârgées de potasse.     cuvier suivant, et l’on procède de la même
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