Page 18 - Decrets mars
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                   des  infirmes,  des  malades  et  des  étrangers?  Les  ordres reli-
                   gieux  en  ont  eu  le  monopole  dès  le  principe  de  l'ère  chré-
                   tienne.  Comptez,  si vous  le pouvez,  les institutions de  bienfai-
                   sance  dont  les  moines  ont  couvert  le  monde  et  voyez  si,  du
                   rachat  des  captifs  sur  les  côtes  de  la  8arbarie jusqu'à l'asile
                   offert aux voyageurs  dans  les  neiges  du  Saint-Bernard,  il  est
                   une seule blessure de  l'humanité,  une  seule douleur de  la  terre
                   que  la main  fraternelle  des  religieux  n'ait secourue et pansée.
                   Aussi  intelligent  que  prodigue  leur dévouement  est descendu
                  jusqu'au  dernier  degré  de  la  misère  et de la souffrance  pour
                   leur donner un  remède et leur porter une  consolation.
                    Aujourd'hui,  il  est  vrai,  on  entrave  par tous  les  moyens la
                  mission  de  charité  qne  les  moines ont à remplir an  milieu des
                  peuples,  mais  l'ingratitude ne les  rebute pas; ils persévèrent à
                  combler de soins et d'amour cette génération perdue d'égoïsme
                  et d'impiété qui  reçoit d'une  main  et qui frappe  de  l'autre.  Cet
                  état  d'aberration  durera-t-il  longtemps ?  Nous  ne  le  pensons
                  pas.  Déjà  nous  entendons la  voix  de  la justice s'élever dans le
                  fond  des  consciences.  Comment ne  verrait-on pas en  effet  l'in-
                  conséquence  et  l'indignité  de  la  conduite que  tiennent envers
                  les  religieux les soi-disant émancipateurs du pays'? Ils chassent
                  les  religieux  des  hôpitaux,  des  prisons et des  ambulances;  ils
                  les  empêchent  de  défricher  nos  terres,  de  relever nos  blessés
                  sur les  champs  de  bataille;  ils  leur interdisent  la prédication,
                  l'enseignement,  toutes  tes  œuvres  de bienfaisance et d'huma-
                  nité,  ils les  mettent  hors  la  loi,  et les  condamnent  au  silence
                  et à l'inaction,  ils  leur  lient  les  mains,  puis,  se  tournant vers
                  nous,  il  s'écrient: Voyez! ces  moines sont des  fainéants! ...
                  Récrimination  singulière !  Les moines sont inutiles  et néan-
                  moins  il faut mettre un frein à leurs empiètements. On  les
                  a expulsés les uns parce qu'ils enseignaient, les autres parce
                  qu'ils prêchaient,  ceux-ci  parce  qu'ils  accaparaient  par
                  leur  travail  tout  le  produit des  industries locales  ou des
                  terres voisines,  ceux-là  finalement  parce qu'ils ne  faisaient
                  rien.
                    Il  n'y a pas une  manière plus explicite de  dire qu'on a chassé
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