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STALINE






                                                                                           LIBÉRA LA RUSSIE



                                                                                           DE L’EMPRISE


                                                                                           ALLEMANDE




                                                                                           ET PRÉPARA



                                                                                           LA VICTOIRE



                                                                                           DE SES ARMES





                                                                                           Par René Vallet




                                                                                            En effet, quand Bismark, inquiet du
                                                                                           relèvement rapide de la F rance, après la
                                                                                           guerre de 1870, voulut parachever notre
                                                                                           défaite, la Russie s’y opposa. Elle avait
                                                                                           compris le danger qu’eût présenté pour
                                                                                           elle, comme pour les autres peuples sla­
                                                                                           ves et pour l’Europe entière, le dévelop­
                                                                                           pement excessif de la puissance alle­
                                                                                           mande qui eût abouti, en fait, à une hégé­
                                                                                           monie sur le continent.
                                                                                            Le péril commun — que certains hom­
                                                                                           mes politiques anglais avaient également
                                                                                           perçu à l’époque — avait rapproché les
                                                                                           deux nations. Au cours des années qui
                                                                                           suivirent, la diplomatie française s’em­
                                                                                           ploya à établir des relations de plus en
                                                                                           plus confiantes et cordiales entre Paris
                    es étrangers qui connurent la Russie   aux Turcs pour mener la guerre de Cri­  et Saint-Pétersbourg. Elle trouva chez
                     d’avant 1914 furent tous frappés   mée.                               ses partenaires une atmosphère favorable
                     par la place considérable tenue par   Ce ressentiment — qui constituait une   et les efforts réciproques aboutirent, à la
                     les éléments allemands aussi bien                                    fin du siècle dernier, à la conclusion de
                     dans les principaux postes de   lourde faute politique — dura longtemps.   l’alliance franco-russe qui fut accueillie,
                L l’Etat et dans l’armée que dans le monde  Il fut réveillé, de nouveau, en 1863,   en France, avec un enthousiasme sans
                de la finance, de l’industrie et du com­  quand Napoléon III et la reine Victoria   égal.
                                                     protestèrent contre la répression san­
                merce.                               glante du soulèvement de la Pologne.   Complété par l’Entente Cordiale avec
                  Cette infiltration datait de l’avènement   « La Russie, répondit Alexandre II, ne   la Grande-Bretagne, cet instrument di­
                au trône d’Alexandre II. Le nouvel em­  permettra aucune ingérence dans les af­  plomatique permettait, selon la formule
                pereur, dont les tendances étaient plu­  faires qui ne concernent qu’elle-même ».  classique, de rétablir l’équilibre euro­
                tôt libérales, songeait à de grandes ré­
                                                       La rancune impériale envers la France
                formes dont la Russie avait un besoin   explique, en grande partie, que le tsar   péen en face de la Triple Alliance italo-
                                                                                          austro-allemande. A vrai dire, la guerre
                urgent. Pour les réaliser, il devait faire
                appel à des hommes cultivés et à des   ait laissé écraser notre pays en 1870-  russo-japonaise avait affaibli notre alliée
                techniciens expérimentés. Il aurait pu les   Toutefois, quelques années plus tard,   et Guillaume II, qui avait vu naturelle­
                chercher en F rance et en Angleterre. Il   rencontrant en Angleterre l’impératrice   ment d’un bon œil ce conflit lointain et
                préféra les prendre en Allemagne, pour   Eugénie, celle-ci lui demanda : « Pour­  exténuant, en avait profité pour gagner
                des raisons de voisinage immédiat et   quoi avez-vous permis cela 7 ». Alexan­  du terrain en Europe sur le plan diplo­
                surtout parce qu’il ne pardonnait pas aux   dre II répondit : « Madame, je ne le per­  matique et pour renforcer ses positions
                Français et aux Anglais de s’être alliés   mettrai plus... ».             en Russie sur le plan intérieur.
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