Page 42 - Les mémoires du curé du maquis Des Glières
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38        LES  MÉMOIRES  DU  CURÉ  DU  MAQUIS
                   habitants  finirent  par  les  décider  à  partir. ..  Ils  s'étaient
                   forgés  une  atmosphère  de  bataille  et  découvraient  tout
                   d'un  coup  que  leurs  amis  d' Alex  étaient  en  danger ...  La
                   camionnette s'ébranla au milieu des chants au grand sou-
                   lagement  des  spectateurs...  Qu'allait-il  arriver ? ...  Les
                   Allemands qui venaient de Cluses et qui avaient tout sim-
                   plement  été  faire  une  reconnaissance  à  la  Clusaz,  redes-
                   cendaient...  Toujours  en  chantant  le  groupe  Lamouille
                   passe  Entremont,  aborde  la ligne  droite  qui  précède  l'en-
                   trée  des Etroits ...  A  cet instant les  camions débouchent...
                   La camionnette s'arrête ...  Vite  « Sauve qui peut.  En haut
                   par les  bois»...  Les  Allemands  ont  repéré  la  manœuvre ...
                   Heureusement  un  des  Russes  se  met  en  batterie  et  tire
                   avec  son  fusil...  Son  courage  sauve  ses  camarades.  Les
                   allemands tirent en effet  sur ce  nid de résistance et négli-
                   gent les fuyards ...  Ils prennent en remorque la camionnette
                   y chargent le  Russe ...  et c'est ainsi que je les voyais passer
                   quelques instants plus tard en batterie sur les ailes de leur
                   camion ...  Pressentant un malheur, je demandais  immédia-
                   tement des nouvelles  à Entremont et j'apprenais que seul
                   le Russe avait été tué et que ses camarades allaient descen-
                   dre par un camion qui venait les chercher depuis Bonneville.
                       A leur retour je représentais à Lamouille qu'on ne fait
                   pas  de  bêtises pareilles et que s'il avait voulu attaquer les
                   Allemands:  il  aurait  dû  mettre  un  fusil  mitrailleur  en
                   batterie  pour  barrer  les  Etroits  pendant  que  d'autres
                   auraient lancé depuis les rochers des grenades sur les camions.
                   Ils  auraient  été  sûrs  d'arriver  à  un  résultat  dans  ce  lieu
                   désert sans risque pour la population et pour eux-mêmes. Il
                   reconnut ce jour-là qu'ils manquaient de chefs et qu'on ne
                   s'improvise  pas  officier  en  quelques  minutes.  Ils  avaient
                   eu chaud, mais ils rapportaient la cervelle du Russe qu'ils
                   enterrèrent en grande pompe le  dimanche 30 janvier. C'est
                   ce  dimanche  là  que  le  détachement  précurseur  arriva  à
                   Glières  pours installer  le  troisième  camp.
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