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74 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
au verre une grande pureté. La forte propor Abordons maintenant la description du
tion de silice qu’il contient lui communique travail du verre dans les verreries de la Bo
une très-grande dureté, et diminue de beau hème.
coup sa fusibilité. Aussi les verres de Bo Le mérite des ouvriers de ce pays consiste
hême se prêtent-ils, mieux que tous les au dans l’économie avec laquelle ils travaillent
tres, à recevoir des décorations au feu de le verre. Dans aucune usine de France, d’An
moufle. Comme le faitremarquer M. Péligot, gleterre ou de Belgique, on ne voit une perte
les verres allemands résistent bien mieux à si faible provenant des déchets de la fabrica
l’action du feu que les verres français. Les tion.
chimistes français qui se plaignent que les Chaque atelier ne se compose que d’un
tubes de verre qui servent aux analyses orga souffleur et de son aide. Rien de plus simple
niques, résistent mal à l’action de la haute que l’outillage de cet atelier. Voici en quoi
température qu’on est obligé de leur faire il consiste:
subir, auraient donc avantage à faire fabri Plusieurs cannes, plus légères que celles
quer ces tubes avec le verre de Bohême. qu’on emploie en France;—quelques-unes
La silice employée en Bohême pour la fa de ces tiges de fer pleines qu’on désigne dans
brication du verre est très-pure. Elle pro les verreries françaises sous le nom tepontils;
vient d’un quartz hyalin qui est roulé par les — un baquet plein d’eau surmonté d’une
torrents, ou de fragments que l’on rencontre sorte de fourche pour y reposer la canne; —
mêlés à la terre végétale. La variété de quartz une auge destinée à contenir les débris de
dit enfumé est celle qui donne la silice la verre ; — une table de marbre pour parer le
plus pure. Pour concasser cette pierre dure, verre; — une palette de bois à surface con
on la soumet à l’action de la chaleur dans des cave qui sert à façonner les objets; — des ci
fours spéciaux ou dans les arches qui sont seaux, pour couper les bords des pièces façon
chauffées par la chaleur perdue des fours de nées; — des pinces, des compas, des moules
fusion. Lorsqu’elle a atteint la température en bois, en métal ou en terre.
rouge-cerise, on la retire du four et on la Les moules de bois sont propres aux ou
projette dans l’eau froide et courante. Cette vriers de la Bohême. Ils en font usage, de
opération, qu’on appelle étonner le quartz, a préférence aux moules de fer, qui ont l’incon
pour but de le rendre friable et de faciliter vénient de rayer le verre. Un moule de bois
sa pulvérisation. Le quartz étonné et refroidi s’use, il est vrai, beaucoup plus vite, mais
est trié, et l’on reporte au four les gros mor on a bientôt fait de le remplacer. Quand les
ceaux qui n’ontpas été suffisamment étonnés. verriers bohémiens se servent de moules en
Le reste est concassé en petits fragments, terre, ils ont soin de les saupoudrer intérieu
dont on sépare les parties parfaitement blan rement de résine. La combustion que fait
ches pour la fabrication des verres fins. Les éprouver à cette résine le verre incandescent,
morceaux qui contiennent la moindre parti produit une couche de charbon et une atmo
cule d’oxyde métallique, sont mis de côté; sphère de gaz qui neutralisent l’effet des
on se sert de leur poudre pour user et façon aspérités intérieures du moule.
ner le verre. Voyons maintenant le verrier bohémien à
Le quartz, étonné et trié, est réduit en pou l’œuvre. Suivons,par exemple, la fabrication
dre dans des mortiers de bois, avec des pi d’une chope à bière. Nous y trouverons la
lons en quartz, pour éviter d’introduire dans preuve de ce que nous disions plus haut sur
le mélange des parcelles de métal qui com l’économie du travail chez le verrier bohé
muniqueraient au verre une coloration. mien.