Page 320 - Les merveilles de l'industrie T1
P. 320

POTERIES, FAÏENCES ET PORCELAINES.                             315

         trouve aujourd’hui dans les collections, et   — sur la préparation du borax, surpassant
         on reconnaît facilement leur date. Mais bien­  celui de Venise ; — des masses de cristal de
         tôt les décors les plus brillants s’appliquent   roche ; — sur la manière de fabriquer dans
         sur la nouvelle porcelaine. Nous donnons   ses fourneaux de Vaqua fortis, de Vaqua
         (fig. 225) comme échantillon, un très-beau   regia, du spiritus nitri, du sa vitriolli, du

         vase de porcelaine de Saxe qui existe dans   sulphur, etc., avec très-peu de frais et avec
         les galeries au Conservatoire des arts et   des produits indigènes; — enfin une li­
         métiers de Paris.                         queur qui, répandue sur un corps animal
           La fabrication de la porcelaine valait   mort, le vitrifie et le conserve à tout ja­
         mieux pour la Saxe qu’une fabrique d’or.   mais, — et quinze autres précieuses dé­
         Nous n’avons pas besoin de dire que l’élec­  couvertes. »
         teur Auguste avait depuis longtemps par­    Malgré la création d’un grand nombre de
         donné à Bôtticher, et cessé de le persécuter   fabriques de porcelaine dure en Allemagne
         pour lui arracher le secret de la pierre phi­  et en France, la fabrique de Meissen con­
         losophale.                                tinua d’être soumise aux rigoureuses pres­
           Certain d’enrichir, par sa découverte, les   criptions qui commandaient secret absolu à
         États de son maître, Bôtticher osa avouer à  tout employé. Le fait suivant donnera la
         l’électeur qu’il ne possédait point le secret   preuve que ces prescriptions sévères étaient
         de la pierre philosophale, et qu’il n’avait   encore en vigueur au commencement de
         jamais travaillé qu’avec la poudre aurifère   notre siècle.
         que Lascaris lui avait confiée.              En 1812, la manufacture de porcelaine de
           Une première fabrique de porcelaine     Sèvres avait dépassé de beaucoup en perfec­
         rouge avait été, avons-nous dit, établie à   tion les fabriques de Meissen. Cependant
         Dresde en 1706, du vivant du comte de      l’empereur Napoléon Ier voulut que le direc­
         Tschirnhaus et une autre pour la porcelaine   teur de la manufacture de Sèvres, Alexan­
         dure avait été créée, en 1710, dans le château   dre Brongniart, allât visiter l’usine de Saxe.
         d’Albert à Meissen, lorsque Bôtticher eut   Il fallut la demande expresse de Napoléon
         découvert l’heureux emploi du kaolin d’Aüe.   pour que le roi de Saxe permît à Brongniart
         Bôtticher rentra dans tous ses honneurs et   d’assister aux travaux et d’examiner les
         même dans son titre de baron. Il reçut, en   fours. Même à cette époque, on jugea né­
         outre, la distinction, bien méritée, de di­  cessaire de décharger momentanément le
         recteur de la manufacture de porcelaine de   directeur de la manufacture de Meissen des
         Meissen. Mais, redevenu libre et ayant re­  obligations de son serment (le secret absolu),
         trouvé sa position brillante, il perdit les   afin qu’il pût expliquer à Brongniart les
         habitudes de travail qu’il avait prises. II ne   procédés employés dans la fabrique. En­
         mena plus, dès ce moment, qu'une vie de    core y eut il une restriction dans la per­
         plaisirs et de luxe, et mourut, en 1719, à   mission octroyée. M. Brongniart fut admis
         l’âge de trente-sept ans.                 seul. Aucun de ses compagnons de voyage
           Que de choses n’avait pas élaborées Bôtti­  ne put obtenir l’autorisation de franchir
         cher, à cet âge aussi peu avancé ! Dans un   avec lui les portes de cette forteresse de la
         mémoire adressé au roi en 1709, il promet­  céramique. Ceci, nous le répétons, se
         tait de publier sous peu de temps ses dé­  passait en Allemagne, en l’an de grâce
         couvertes sur les objets suivants : « Des va­  1812!
         ses’de toutes sortes de couleurs, plus durs   Le plus célèbre et le plus beau spécimen
         que le porphyre et pareils à la pierre fine ;  du vieux Saxe est le service de table, appar­
   315   316   317   318   319   320   321   322   323   324   325