Page 215 - Les merveilles de l'industrie T1
P. 215
210 MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.
« Le vernis, qu’on appelle rouge et jaune, ne me । qui dessinait et touchait si rapidement ces figures s’y
paraît avoir aucune couleur; mais comme il est | présente dans toute sa force et dans toute sa naïveté :
mince et transparent, il exalte et ravive la couleur c’est ce qui fait le mérite ou au moins l’intérêt de
rougeâtre de la pâte. ces sortes de peintures.
« Le noir,seconde couleur dominante des vases cam- [ « Le noir est mis sur le vernis ou enduit transpa
paniens, peut être aussi considéré quelquefois comme ) rent, et participe plus ou moins du brillant de ce
un vernis général placé sur ce premier. Les vases vernis; le blanc et le rouge mat sont placés sur le
campaniens présentent quelques autres applications noir.
de couleurs peu variées et toujours mises en teinte « Les anciens attachaient un grand prix à ce genre
plate. Ces couleurs sont en général opaques, ma de peinture, puisqu’ils nous ont transmis le nom de
tes, et de la nature des engobes; ce sont : l’artiste qui l’avait pratiqué le premier. C’est à
« Le rouge de brique mat, employé en rehaut et en Téléphanus de Sicyone qu’on en attribue l’inven
ornement ; tion.
« Le rouge violâtre mat ; « Il est généralement admis que ces poteries sont
k Le blanc, employé de la même manière, mais de la plus haute antiquité, et que parmi elles les
plus communément il est d’une nature argileuse, plus anciennes sont celles dont les ornements et les
happant à la langue et devenant translucide par figures 'sont en noir sur un fond rouge-pâle ; elles
l’absorption de l’eau. ont une raideur de contour et de pose qui contribue
« Il est employé tantôt à faire des ornements à caractériser cette ancienne époque, qu’on fixe à six
blancs, qui sont toujours en saillie, et qui ont ce ou sept cents ans avant l’ère chrétienne. Ces vases,
pendant beaucoup de fixité, tantôt en fond général ; d'origine grecque, qu’on netr ouve ni en Toscane, ni
il paraît moins solide; il est extrêmement absor à Pompeïa, ni à Herculanum, mais qui sont si abon
bant, et quelquefois peint en jaune. dants dansles environs de Capoue, de Nola, deCumes,
« C’est sur ce fond blanc que les anciens ont quel et jusqu’aux portes de Naples, étaient déjà rares et
quefois placé des peintures de diverses couleurs, fort recherchés du temps de Jules César.
rouge vif, verte, bleue, mais toujours à teinte plate. « Ce sont en général, ou des vases votifs, ou des
Ces couleurs ne sont point de la nature des couleurs vases reçus en prix, ou enfin des vases d’ornement
vitrifiables ; elles n’ont qu’une très-faible adhérence qu’on enterrait avec celui qui les avait possédés,
avec le fond; elles n’appartiennent donc pas à l’art comme étant une des choses auxquelles il était le
dont nous traitons, et je n’en parle ici que pour faire plus attaché. Aussi est-ce presque uniquement dans
apprécier ce qu’on doit entendre par ces vases grecs, les tombeaux, entre les jambes et tout autour des
ornés de sujets et d’ornements richement colorés, et squelettes, qu’on trouve presque tous ceux qui gar
qui sont mentionnés comme des objets aussi pré nissent en si grand nombre les collections de vases
cieux que rares. antiques, formées dans la plupart des villes de l’Eu
« Néanmoins, on remarque que les contours des rope où les arts sont cultivés.
figures et des grandes parties qui composent ces « C’est à leur destination religieuse, c’est à la place
espèces de tableaux ont été tracés avec une couleur qu’elle leur a assignée dans des lieux qui les ont mis
vitrifiable jaunâtre. pendant des siècles à l’abri des dégradations de tous
« Quelques uns de ces vases ont offert, mais bien genres, qu’on doit la belle et abondante conservation
rarement, des ornements en or : ce sont en général de ces poteries, si instructive sous tous les rapports.
de petites perles ou de petits épis d’or placés en or « Les poteries antiques de Sicile, celles des envi
nements, sur d'autres ornements, ou sur des figu rons d’Athènes, d’Égine, etc., peuvent se rapporter
res, et qui paraissent avoir eu pour dessous un pied en général à cette série de fabrication antique.
ou collage fait avec un engobe rougeâtre, qui forme a Poteries étrusques et samiennet. — La seconde
une légère saillie. La feuille d’or a été appliquée sur série de vases antiques qu’on doit rapporter à la
cette saillie, qui paraît avoir fait l’office du fondant classe des poteries dont nous faisons l’histoire, sont
de bismuth, avec lequel on fixe l’or sur les cou ceux qui font partie des poteries grecques-samiennes.
vertes non ramollissables. Ce sont là les véritables vases étrusques, puisqu’ils
« Les figures, qui sont presque toujours en rouge se trouvent dans toute l’ancienne Etrurie.
sur un fond noir, ont été réservées ; on en a tracé « Ils ont une pâte fine, d’un rouge jaunâtre plus
les contours avec du noir, et le fond a été mis au pur, d’une plus grande densité et d’une plus grande
pinceau et rechampi à l’entour des figures. La plus dureté que celle des vases campaniens ; ils sont,
simple attention suffît pour faire voir que les anciens comme eux, couverts d’un vernis mince qui avive
n’ont employé dans le posage des fonds et la pein la couleur de la pâte.
ture des figures et ornements, ni le procédé du pu- a 11 y en a aussi à pâte noire, mais ils ne présen
toir, ni celui du grattage, ni celui des types ou ré tent presque jamais les peintures d’ornements et de
serves découpées. Il y a plus d’incorrections, mais figures noires et rouges qui caractérisent les vases
aussi plus de sentiment ; celui de l’ouvrier artiste campaniens ; ils sont donc, sauf quelques exceptions