Page 30 - La Lecture Expressive
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Lecture 12. Bamban
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I.e jeune Daniel Eyssette - (;'est le Petit Chose de la 8• lecture - a dQ,
, pour gagnw- sa vie, entrer comme maitre d'études au collège de Sarlande
, (en réalité, Alès). Ce sont là, évidemment, des souvenirs de jeunesse
d'Alphonse Daudet.
1. Deux fois par semaine, le dimanche et le jeudi, il fallait mener
les élèves en promenade. Cette promenade était un supplice pour
moi. D'habitude, nous allions à la Prairie, une grande pelouse qui
s'étend comme un tapis au pied de la montagne, à une demi-lieue
de la ville.
Quelques gros châtaigniers, trois ou quatre guinguettes peintes
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en jaune, une source vive courant dans le vert faisaient l'endroit
charmant et gai pour l'œil... Là, je gardais les élèves. Un dur métier
dans ce bel endroit !
2. Parmi tous ces diablotins ébouriffés que je promenais deux
fois par semaine dans Ta ville, il y en avait surtout un, un demi-
pensionnaire, qui me désespérait par sa laideur et sa mauvaise
tenue.
Imasinez un horrible petit avorton 2, si petit que c'en était ridi-
cule; avec cela, disgracieux, sale, mal peigné, mal vêtu, sentant
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le ruisseau, et, pour que rien ne lui manquât, affreusement bancal •
Jamais pareil élève, s'il est permis toutefois de donner à ça le
IlQm d'élève, ne figura sur les feuilles d'inscription de l'Univer-
sité. C'était à déshonorer un collège.
3. Pour ma part, je l'avais pris en aversion ', et, quand je le
voyais, les jours de promenade, se dandiner de la q1,eue de la colonne
avec la grâce d'un jeune canard, il me venait des envies furieuses
de le chasser à grands coups de botte, pour l'honneur de ma division.
Bamban - nous l'avions surnommé Bamban à cause de sa démar-
che plus qu'irrégulière - Bamban était loin d'appartenir à une
famille aristocratique • Cela se voyait sans peine à ses manières, à
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se1 façons de dire et surtout aux belles relations qu'il avait dans le
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