Page 154 - La Lecture Expressive
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                                 7 4.  Lea  revenant•
              Lecture
              1.  Quand Claudillon mourut, li19.  maison resta close  pendant  cinq
            ou  six mois.  Un locataire,  à la  fin,  vint l'habiter, et les  fenêtres  se
            rouvrirent.
              Mais il courait dans Maillane une rumeur étrange : la  maison  de
            Claudillon  était hantée  •  Les  locataires  entendaient  ravauder  2  et
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            farfouiller  toute la  nuit : un  bruit particulier, comme si  on  remuait
            du papier, du parchemin ...
              Ils eurent beau, les locataires, fureter, virer, tourner dans tous les
            coins de la maison, nettoyer le  buffet,  regarder sous le  lit, sous l'es-
            calier, sur les planches de l'évier, ils ne virent rien ; et ce bruit renais-
            sait  toutes  les  nuits ;  à  ce  point,  vous  dirai-ie,  que  ces  gens
            prirent peur et qu'ils déménagèrent ...
             2.  Dans le village on ne parlait que de revenants. Les hommes, le
            dimanche, près du puits de la place, s'entretenaient tous de la chose
           et  disaient : « Claudillon,  le  pauvre  Claudillon  était  pourtant  un
            brave homme : il n'est pas croyable que ce soit lui.
             -   Mais alors, qui serait-ce ?  »
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              Le  grand Charles,  un pince-sans-rire  ,  dit après avoir toussé :
             « N'est-ce pas clair ? Du moment qu'on remue des papiers, ce doit
           être des notaires.  »
             Tout le monde s'écria : a Le grand Charles a raison, ce doit être des
            notaires,  puisqu'ils  remuent  des  papiers.
             -  Ce sont des notaires ! Ce  sont des  notaires ! »
              L'on n'entendait plus que cela dans les rues de Maillane. Les Mail-
           lanais n'en dormaient plus et, lorsqu'ils en parlaient, en avaient la
           chair de poule.
             3.  1,  -  Ha ! nous  le  verrons  bien  si  ce  sont  des  notaires ! » dit
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           flegmatiquement  M.  Jérôme,  un  ancien  dragon  des  guerres  de
           l'Empire.  Le  soir,  l\l.  Jérôme  chargea  ses  pistolets, et,  tranquille
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           comme quand il  allait à la pipée  ,  il  vint, à  la nuit close,  se  blottir
           dans la  maison  du  pauvre Claudillon.  Muni  d'une lanterne sourde,
           qu'il recouvrit de son manteau, il  s'étendit sur deux chaises, atten-
           dant que les  notaires remuassent leurs  papiers.
             4.  Tout  à  coup,  frou-frou l  cra-cra 1 voilà  les  papiers  qui  BQ
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