Page 19 - Vincent_Delavouet
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bation universelle de tels actes monstrueux. Que ceux qui'
me liront et qui se rappellent de ces faits me jettent la
première pierre (s’ils l’osent).
Revenons dans ma cellule, où je me morfondis pendant
une huitaine de jours, en ayant le temps de réfléchir copieu
sement sur l’injustice des hommes et leur férocité vis-à-vis
des faibles.
Enfin, un beau matin, je fus mandé au Parquet. Mes cer
tificats avaient été vérifiés. On reconnut qu’il ne m’était
guère possible d’être à Paris et à Dreux en même temps et
que mon signalement ne devait pas trop correspondre avec
celui de mon homonyme.
Relaxé, je m’empressai de retourner au village, où je
retrouvai ma jeune sœur réfugiée chez ma vieille marraine.
Je ne proposai pas à mon père de venir avec nous, en raD
son de son attitude et, après de rares adieux à de rares
amis restés presque fidèles, je me disposai à quitter à jamais
le pays qui m’avait vu naître, pour essayer de tenter la
chance chez les Américains plus hospitaliers. Puis, ce qui
me décida complètement fut que, par l’intermédiaire d’un
ami, je pus rentrer en possession d’une partie des 350 francs
que l’on avait voulu me voler.
Chapitre V
Faux départ — Bondy
Novembre 1892.
Nous voici donc partis, ma jeune sœur et moi, de ce maudit
pays, que je pensais alors quitter définitivement. Ma bourse
était peu garnie, mais mon cœur était plein d’espoir, avec
une volonté absolue de réussir.
Nous nous arrêtâmes deux ou trois jours à Paris, pour
faire visiter à ma jeune sœur les principales curiosités de
la capitale, dont elle ne pouvait se faire une idée ; puis nous
partîmes directement sur Anvers, pensant trouver un bateau
en partance pour New-York.