Page 18 - Vincent_Delavouet
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un autre bureau et voici le brigadier en conversation fort
                 animée avec ce Y.
                   Le résultat de cette conférence ne fut pas précisément ce
                 que je supposais ; -car, aussitôt après le départ de mon...
                 défenseur, le brigadier vint me prévenir qu’il avait reçu
                 des ordres de la sous-préfecture pour me garder à sa dis­
                 position, en attendant mon transfert à Thonon. On me con­
                 duisit donc à la geôle, où je passai la nuit, comme un
                 vagabond. J’eus encore la naïveté de remettre au brigadier
                 une somme de 7 fr. 50 en le priant de bien vouloir la donner
                 à ce Y., pour l’indemniser de son déplacement, dans le cas
                 où il accepterait de venir déposer en ma faveur à Thonon.
                   Le lendemain commença pour moi mon chemin de croix.
                 Encadré de deux gendarmes, je dus suivre, à pied, les
                 18 kilomètres de route poussiéreuse qui séparent Lullin de
                 Thonon, suivi au départ des regards hostiles de mes conci­
                 toyens.
                   Arrivé à Thonon, je fus, comme un vulgaire malfaiteur^
                 incarcéré à la maison d’arrêt.
                   Le même jour, présenté au Parquet, après avoir indiqué
                 au substitut mes nom, prénoms, profession et domicile et
                 avoir protesté de nouveau de mon innocence, j’eus la....
                 satisfaction de voir ce M. Y., qui s’était effectivement
                 dérangé pour venir déposer en ma faveur ! Ces Messieurs
                 s’enfermèrent dans le cabinet du substitut et le résultat
                 de leur conversation fut....  que l’on me reconduisit dans
                 ma cellule, où je fus mensuré.
                   C’est alors que, livré à mes méditations, je compris que
                 j’avais été indignement trompé par sire X. d’abord et par
                 son ami Y ensuite, qui usa de toute son influence
                 contre moi.
                   Et tout cela, dans le vil dessein de s’emparer de mon
                 petit patrimoine. Ces dignes associés sont morts actuelle­
                 ment. Je devrais dire : « Paix à leurs cendres ! » Mais, réelle­
                 ment, la façon dont ils ont agi l’un et l’autre contre moi, qui
                 ne leur avais jamais fait de mal, est indigne, révoltante et
                 d’autant plus vile, qu’ils profitaient, pour me dévaliser, d’un
                 moment où j’étais incapable de me défendre.
                  Certes, je ne crie pas : Vengeance ! mais je voue à la répro-
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