Page 747 - Les merveilles de l'industrie T1
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744                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.


               température plus basse que quand on dis­  de vitriol était le sulfur philosophornm ou
               tille le vitriol seul, comme on le fait de nos   soufre des philosophes, un autre adjuvant
               jours. Dans ce dernier cas, la décomposition   de la préparation de la pierre philosophale;
               s’opérant à une température plus élevée,   et Basile Valentin, dans son ouvrage cité
               doit amener la destruction et la perte d’une   plus haut (Publication des procédés inconnus),
               partie de l’acide sulfurique.             explique comment cet esprit de vitriol peut
                 Quoi qu’il en soit, voici la description du   être tantôt l’un, tantôt l’autre de ces corps.
               procédé donné par Basile Valentin.
                                                           « Calcine, dit Basile Valentin, le vitriol liquide,
                                                         place-le dans une cornue, à laquelle tu luteras une
                « Prends une partie de silice, et 2 parties de vi­
                                                         allonge ; distille per gradus, tu obtiendras d’abord
               triol calciné, pile-les ensemble, et les mets dans un
               vase de terre, qui garde bien les esprits, et ne les   un spiritus blanc qui est le mercure des philosophes. »
               laisse pas traverser, ou dans une cornue de verre.   On distinguait donc l’acide sulfurique
               Adapte à ce vase une longue allonge, fais dessous un
               feu ardent pendant un jour et une nuit, et de même   faible, obtenu au début de la distillation du
               un second jour et une seconde nuit.Tu verras d’abord   vitriol, de l’acide concentré, qui distillait à
               apparaître des spiritus grisâtres, et si tu augmentes   la fin de l’opération. On désignait, avons-
               le feu, tu apercevras ensuite des gouttes rougeâtres.   nous dit, par le nom à'oleum vitrioli (huile
               Chauffe alors jusqu’à ce que les spiritus et les gouttes
                                                         de vitriol) l’acide obtenu par la distillation
               rouges soient distillés ; alors, reçois le liquide qui
               distille dans un vase de verre, enferme-le exacte­  du vitriol de fer et par le nom ééoleum
               ment dans un bain-marie, et rectifie-le ; alors le   sulfuris (huile de soufre) l’acide obtenu par
               phlegma s’échappe, et il reste une huile de vitriol
                                                         la combustion du soufre dans des cloches.
               d’un rouge noir au fond de la cornue. »
                                                           Angelo Sala avait soupçonné l’identité de
                 Nous ajouterons maintenant que Basile   ces deux produits.Boyle, dans ses Considéra­
               Valentin connaissait fort bien l’acide que
                                                         tions, publiées en 1666, développa cette idée.
               l’on obtient par la combustion du soufre   Après lui Hurkel, en 1667, dans ses Remar­
               avec du salpêtre. Il dit, dans son Char de   ques sur les analyses chimiques, insista sur le
               triomphe de ïantimoine :                  même fait.
                                                           Le célèbre André Libavius démontra l’i­
                « On prépare une huile médicinale avec de l’an­
               timoine, par le procédé que je vais te décrire :  dentité de ces deux acides.
                « Prends antimoine, soufre et salpêtre, poids   Le procédé industriel pour la préparation
               égaux, fais-les brûler sous une cloche, tu obtiens ainsi
               l’huile de soufre (oleum sulfuns), comme on le fait   de l’acide sulfurique au moyen du sulfate
              per campanam. Cet usage était pratiqué depuis long­  de fer, en d’autres termes de Yacide de
               temps par les anciens ; mais il est préférable de   Nordhausen, a été décrit en 1755, par un
               substituer à la cloche un chapiteau, portant une   chimiste allemand, J. E. Bernhardt, dans
               allonge ; on obtient alors plus d’huile qu’aupara-
                                                         ses Recherches et expériences chimiques.
               vant. Sa couleur est la même que celle de l’acide
               obtenu par le soufre ordinaire, mais à cause de   C’est, comme nous l’avons dit, vers 1754,
               l’antimoine il possède des propriétés médicinales   qu’Angelo Sala découvrit le procédé de pré­
               très-remarquables. »
                                                         paration de l’acide sulfurique par la com­
                 L’huile de soufre ou l’esprit de soufre, que   bustion du soufre sous une cloche. La pre­
               l’on obtenait ainsi, avait une grande impor­  mière mention certaine de cette grande
               tance pour les alchimistes. Aux yeux de beau­  découverte industrielle, se trouve dans un
               coup d’amateurs du grand œuvre, cette huile   ouvrage de Dossie publié en Angleterre en
               était l’arcane qu’ils désignaient sous le nom   1758, sous le titre de F.laboratory laid. Cet
               de mercure des philosophes, l’un des produits   auteur nous apprend que quelques années
               réputés essentiels pour la préparation de la   auparavant, un brevet avait été pris en An­
               pierre philosophale. Pour d’autres, ceï esprit   gleterre pour celte invention. Comme nous
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