Page 375 - Les merveilles de l'industrie T1
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370                   MERVEILLES DE L’INDUSTRIE.

                    faite, le potier, auquel son devancier a légué des   Passons à la fabrication en France des
                   formules, des secrets, se contente d’acheter à quel­  faïences fines, dites anglaises.
                   ques-uns de ces moulins puissants qui, dans le Ware
                   district, exécutent le broyage des matières dures, la   En France, c’est à Creil et à Montereau
                   barbotine de silex, celle de Cornish-stone, et quel­  qu’existent les plus importantes fabriques
                   quefois même l’argile délayée. Ces barbotines di­  de faïences fines dites anglaises. A Choisy,
                    verses (sfqp) sont vendues, à une densité détermi­
                                                              à Chantilly, à Sarreguemines et dans quel­
                   née, dans des barils de 300 à 600 litres. Le potier les
                   mélange dans sa fabrique, les additionne directe­  ques autres villes du Nord, à Saint-Clément,
                   ment de kaolin, si la composition l’exige, les raffer­  à Lunéville, à Toulouse, on fabrique égale­
                   mit, les façonne et les cuit. L’organisation de ces   ment ces faïences. Les manufactures des
                   dernières fabriques semble être le type vers lequel
                   tendent aujourd’hui les potiers du Staffordshire ; il   environs de Paris produisent presque exclu­
                   y a peu de temps encore, un petit nombre d'entre   sivement de la faïence fine, cailloutée, et de
                   eux seulementse trouvaient en mesure d’opérer dans   la terre de pipe.
                   l’atelier même le raffermissement des pâtes; au­
                   jourd’hui, la plupart montent des machines à va­  Dans les fabriques des environs de Paris,
                   peur pour réaliser cette opération qu’a beaucoup   on emploie en général de l’argile de Mon­
                   simplifiée, dans ces dernières années, l’emploi des   tereau. C’est une argile grisâtre, très-riche
                   presses de Needham et Kyte.
                                                              en silice. (EUe contient 73 pour 100 de si­
                     « Ce remarquable faisceau de poteries anglaises,
                   groupées, depuis près d’un siècle, dans un district   lice et 27 d’alumine.) Elle est donc bien
                   restreint, où l’on ne trouve aucune des matières   moins riche en alumine, c’est-à-dire en ma­
                   premières qu’exige la fabrication, où rien, en   tière plastique, que les argiles anglaises.
                   s'ornais, ne justifie leur agglomération, semble en
                                                                La pâte de ces faïences est composée de :
                   ce moment menacé de se rompre. Déjà des centres
                   céramiques nouveaux se sont créés à Glasgow et à ■
                                                                    Argile de Montereau............    87
                   Newcastle-on-Tyne. Les matières premières arrivent   Silex pyromaque................... 13
                   directement par voie de mer au pied de ces usines
                   et les manufacturiers économisent ainsi les frais de                     100
                   transport de ces matières par canal, de Liverpool
                   aux Potteries, transport dont le prix ne s’élève pas à   On cuit cette faïence à 80 degrés seule­
                   moins de 10 francs par tonne.              ment du pyromètre de Wedgwood. Cette
                     « A l’exception de l’acide borique et des produits   température est inférieure à celle qui sert à
                   accessoires, toutes les matières premières employées   la cuisson du même produit en Angleterre,
                   en Angleterre, sont extraites du sol de ce pays. L’ar­
                   gile plastique vient du Dorsetshire et du Devon-   mais on ne saurait la dépasser sans altérer
                   shire ; le kaolin, la pegmatite sont fournis par le   ou décolorer la pâte. Aussi les faïences fran­
                   Cornwall, et les silex sont recueillis sur les côtes   çaises sont-elles moins blanches que les
                   méridionales de l’Angleterre; quelquefois, cepen­
                                                             faïences anglaises.
                   dant, ces silex sont rapportés, comme fret de re­
                   tour, des côtes de France et surtout de Dieppe.  La couverte que l’on applique sur ces
                     « C’est, d’ailleurs, dans des proportions colossales   faïences, varie d’une fabrique à l’autre. Ce
                   que ces divers produits sont livrés à la fabrication
                                                             sont, en général, des vernis très-fusibles, car
                   des faïences fines et des porcelaines tendres anglai­
                   ses; d’après une statistique, dressée en 1865 par   la température des foursdans lesquels on cuit
                   M. Coghill, le poids de la pâte ou masse, prête pour   la faïence pour le vernissage, ne dépasse
                   le façonnage, s’élève, pour le district des poteries,   pas 18 degrés du pyromètre de Wedgwood.
                   à 160,000 tonnes ; dans ce poids, l’argile plastique
                   figure pour 28 pour 100; le kaolin du Cornwall,   Voici la recette de deux de ces vernis :
                   pour 26 pour 100; le silex, pour 29 pour 100; la
                                                                    Sable quartzeux blanc..........   28
                   pegmatite ou cornish-stone, pour 19 pour 100. Le
                   poids du borax employé pour les couvertes n’est pas   Minium................................... 45
                                                                    Soude à 70°...........................  17
                   moindre de 1,200 tonnes; 30,000 kilogrammes
                   d’oxyde de cobalt servent à azurer les pâtes et les   Verre ordinaire.....................  9
                                                                    Borax du commerce............. ■ 1
                   glaçures; enfin, plus de 375 kilogrammes d’or, soit
                   près d’un million de francs, figurent, comme ma­                         100
                   tière première, dans la décoration de ces poteries. »  (3 millièmes d'azur de cobalt.)
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