Page 144 - Album_des_jeunes_1960
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142                           l’agneau noir de mon cœur


                  A travers ses larmes, il vit des silhouettes brouil­  Tout le monde voulait aider le chef de gare à
                lées de l’autre côté de la barrière : Annie qui    sortir du fourgon la caisse de Danny et la boîte
                pleurait, la grand-mère qui se tamponnait les yeux   contenant les couvertures de Grand-mère Corbin.
                et l’oncle Henri qui mordait son cigare. Il se       — Arrière, mes amis. Ne faites pas peur à
                redressa et s’apprêta à emmener son agneau hors    notre lauréat.
                de l’arène.                                          — Hé ! vous vous rendez compte !...
                  — Un instant, mesdames et messieurs ! cria         — Le prix spécial !
                le président du jury. Attendez, jeune homme.         — J’ai toujours dit que ce garçon et son agneau
                  — Nous savons accepter notre défaite, dit        feraient leur chemin.
                Jacot.                                               — Est-ce que je peux le toucher, Jacot ?
                  — Ton cran me plaît, mon garçon, et ton            — Vous aimez le chemin de fer, Grand-mère ?
                mouton aussi. Le seul ennui, c’est qu’il est noir.   — C’est mieux que de marcher, répondit
                Cela le met en quelque sorte dans une classe à     Grand-mère Corbin.
                part.                                                — Ecoutez tous, c’est moi qui régale ! cria
                  Un rire léger courut dans la foule, mais le juge   M. Grosbois. J’ai mis deux caisses de limonade à
                leva la main pour obtenir le silence.              rafraîchir. Il y a six melons d’eau et un baquet
                                                                   de crème glacée.
                      Une réception pour Danny                       Les applaudissements redoublèrent.
                                                                     — Mais qu’est-ce que je vais faire de Danny ?
                  Ils quittèrent la foire et prirent le train pour   demanda Jacot.
                rentrer chez eux, fatigués mais bien contents.       — Eh bien ! amène-le, dit M. Grosbois. C’est
                Soudain, comme le train abordait un tournant,      sa fête, pardi !
                Jacot aperçut la petite église, la boutique de       Bien plus tard, on rentra au Creux du Chat
                M. Grosbois et tout le reste du village.           dans la charrette de l’oncle Henri. Jacot, assis sur
                  — Grand-mère, Annie, Oncle Henri ! On est        le siège de devant, était perdu dans ses rêves.
                chez nous !                                        Tout un monde de joie s’ouvrait devant lui.
                  — Miséricorde, s’écria Grand-maman Corbin.
                Qu’est-ce que c’est que cet attroupement ?
                  Ils ne savaient pas que l’oncle Henri avait
                télégraphié la bonne nouvelle à M. Grosbois.
                  — La fanfare et tout, cria Annie. Tout le
                monde agite la main.
                  — Hum ! dit l’oncle Henri. Un comité
                d’accueil.
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