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PEUT-ON REEDUQUER LE PEUPLE ALLEMAND? (Suire et fin)
dominatrice, qui n’a de justification à mands ont minutieusement recherché sons, on ne voyait plus que décombres,
donner qu’à elle-même. dans leur mythologie, dans les enseigne cendres, charpentes calcinées, ulcères
ments de leurs Chefs et de leurs philo purulents qui marbraient la campagne.
En même temps, une propagande Un gigantesque panache de fumée noire
païenne, d’abord privée, puis officielle, sophes les pires principes pour éduquer marquait la trace dç notre passage. Nous
tout un peuple, pour en faire une doc
ramène les esprits aux croyances de la trine officielle, une règle de conduite au \ avions allumé un bûcher, et ce qui brû
tribu germaine. Au XIXe siècle, c’est le service d’un idéal de domination et de lait là, ce n’étaient pas seulement les
rôle des historiens. C’est de 1823 que rapine. Ils ont sciemment et scientifique matérieux inertes, c’étaient aussi nos
date le livre devenu classique en Alle ment cultivé, pour les utiliser à leurs espoirs, nos rêves, toutes les valeurs de
magne, qui explique que les dieux grecs fins, toutes les bassesses de la bête hu la Société bourgeoise, tous les comman
étaient des aryens, parce qu’ils étaient maine. On comprend qu’un habitant de dements du monde civilisé... C’étaient
blonds. Et depuis 120 ans, élèves et pro Berbn ou de Munich n’ait pas les mêmes auss; les idoles que vénérait encore cette
fesseurs ressassent de telles âneries. Au aspirations qu’un parisien ou un londo époque d’où nous étions évadés : c’était
XXe siècle, celui des Ecrivains et des nien, mais encore faudrait-il qu’on ne le bagage suranné, tout le bric à brac
Chefs politiques. En 1937, un professeur lui ait pas inculqué à l’égard de ces der d’idées et de sentiments périmés que
de Bonn ne crut pas pouvoir célébrer niers les sentiments d’un apache pour nous traînions après nous : « Et, puisque
cent cinquante ans d’efforts continus ont
plus dignement l’anniversaire de son le passant qu’il va assaillir. voulu recréer la mentalité primitive, on
Fuhrer qu’en montrant le renouvelle LA RÉÉDUCATION DE L'ALLEMAND peut bien citer ce que César écrivait il
ment des vieilles croyances non seule y a près de vingt siècles : « Le plus beau
ment dans le souvenir, mais dans l’action EST-ELLE POSSIBLE ? titre de gloire pour les é*ats (germains)
du peuple allemand : « Les belles légen Chacun connaît le goût de cruauté ou c’est d’avoir fait le vide,autour de soi,
des sont redevenues au sens strict, des de destruction dont il vient de faire de façon à n’être entouré que des déserts
mythés, puisqu’elles justifient, soutien preuve. Mais cela ne date pas d’Hitler. les plus vastes possible. Ils tiennent pour
nent et provoquent des comportements Voici comment, peu après 1918, Ernst la marque de leurs vertus guerrières de
individuels et collectifs qui ont tous- les Von Salomon, le''meurtrier de Rathenau, faire partir leurs voisins en les chassant
caractères du sacré ». Il y voit l’origi appréciait ses exploits dans le Baltikum : de leurs champs et d’empêcher quicon
nalité de « l’actuelle expérience alle « Là où se dressaient naguère des mai que d’avoir l’audace de s’établir près
mande ». Qu’en sort-il ? Le d’eux ».
goûtf de la mort héroïque, Cette constance dans
le mépris des vieillards,
l'instinct dominateur et
l’idée que l’exploit du destructeur est évidemment
surhomme ne s’improvise
pas, mais se prépare par peu encourageante, et,
plus que la possibilité, la
l’usage constant des bri
mades, des mascarades difficulté de la rééducation
ressort de ces lignes. L’ex
d’hiver avec ■ les Sociétés périence vaut cependant
de garçons du village fai d’être tentée. Sa réussite
sant régner une petite serait un appui apprécia
terreur : maisons enva ble et un soulagement effi
hies, quêtes impérieuses, cace à l’effort de surveil
huches pillées, filles vio lance militaire que l’opi
lées, femmes poursuivies, nion française approuve
déchaînements qui rappel lucidement, mais qui pour
lent encore si clairement rait biçn lui peser un jour.
les légendes ; la meute Mais il faut bien voir les
d’hommes fauves et de conditions de cette tenta
guerriers champions, la tive. Jusqu’à complète
pratique ininterrompue, de réussite, elle ne doit être
puis le seuil de l’his que le complément de pré
toire, de banquets, de l’en cautions plus matérielles.
ivrement collectif, la clas D’autre part, il ne suffit
se des guerriers qui enca pas qu’elle annule cette
draient, poussaient, com ïongufe propagande, il lui
mandaient la foule du faut en détruire les racines
tiers-ordre dont la néces par une contre-propagande
sité faisait des guerriers, aussi tenace et aussi mas
les trésors amassés et en sive. A cet égard, on peut
constater, sans insister ici,
fouis. C’est ce que résumait que ce retour à la brutalité
Mussolini en 1938 : « Notre primitive a coïncidé avec
ligne de conduite nous est la naissance de l’industrie
dictée par nos ancêtres du moderne allemande et s’est
fond de la préhistoire ». accentuée avec la naissance
Certes, il y a dans le des trusts. Il faudrait en
passé de tous les peuples fin que cet effort de réédu
le meilleur comme le pire- cation soit rythmé sans las
Mais a-t-on jamais vanté à situde par la démonstra
nos écoliers les procédés tion constamment répétée
d’une Saint Barthélemy, de cette perverse déforma
ou d’une croisade des Albi tion intellectuelle et mo
geois ? A-t-on jamais glo rale que les Allemands ont
rifié devant eux cet ordre si avidement subie depuis
terrible : « Tuez les tous, un siècle et demi.
Dieu reconnaîtra bien les
siens ». Seuls/ les Alle Clavel-Rolland.
CE PEUPLE QUI RÊVAIT D'ASSERVIR LE MONDE 11 QUI EST MAINTENANT
ASSERVI A SON TOUR. PARVIENDRA-T-IL JAMAIS A RENONCER A SON FOL
ORGUEIL POUR ENFIN SE CONSACRER AVEC LES PEUPLES LIBRES A LA
22 CONSTRUCTION D'UN MONDE FRATERNEL ET PLUS JUSTE.