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UN EXEMPLE
de 1*1 de guerre
C 'EST au XIIIe siècle que prit nais
sance l’activité industrielle de Saint-
Etienne, mais jusqu’au milieu du
XVIIIe siècle, elle demeura incohérente. En
1764, une réorganisation technique, limi
tant le nombre des modèles, donna d excel
lents résultats. La Société devint Manu
facture Royale. Dès lors toutes les pé
riodes de production intensive qu’elle’con
naîtra coïncideront avec les périodes mi
litaires les plus importantes de notre his
toire. Saint-Etienne, peut-on dire, travailla
toujours pour la victoire.
En 1789, la Manufacture Nationale
— M. A. S. — fournit des armes aux
soldats de la Révolution. Aujourd'hui,
elle travaille fébrilement pour l’armée nou
velle, qui englobe les F.F.L avec leur
jeune ardeur.
Dans l’intervalle, en 1918, 14.000 ou
vriers fabriquèrent des fusils, des mitrail
leuses, des freins pour notre 75. Puis, Photo Edition Sèvo
vint la période difficile de l’après-guerre,
pendant laquelle le chiffre des ouvriers SAINT-ÉTIENNE FORGE LA VICTOIRE
tomba à 1.200. Mais cette inertie n’était
qu’apparente : on perfectionnait, on créait
des prototypes. Les autorités militaires
compétentes adoptaient le fusil à répéti
tion modèle 36, le pistolet automatique
7/65 et le pistolet mitrailleur.
La M.A.S. avait également présenté
une mitrailleuse 8 mm. plus maniable que A la Manufacture, d’habiles excuses on se trouvait en présence d’usines par
la Hotchkiss, difficile à transporter en rai — ajoutées à la lourdeur germanique ,— tiellement dévastées par les bombardements
son de son poids. Mais les crédits firent permirent aux ouvriers d’éviter de fabri et dont le matériel avait été détérioré.
défaut pour leur fabrication en grande sé quer des pièces pour l’industrie de guerre Le Commandement militaire local, se
rie et, en 1939, il fallut procéder à une « 11 leur manque toujours quelque chose », préoccupant immédiatement du problème,
complète mise en train. disaient les Allemands. Par contre, cha créa une section spéciale avec les lieute
Des projets d’agrandissement furent, à cun, du même cœur, pensait à l’avenir et nants Humbert et Girin. La direction de
ce moment, envisagés et partiellement réa les techniciens mettaient au point des piè la Manufacture prit, en plein accord avec
lisés, qui permirent à 1 1.000 ouvriers de ces de précision que seuls les Boches fa lui, les mesures les plus urgentes. Cette
forger chaque mois 25 à 30.000 armes briquaient jusqu’alors. En grand secret, et section de l’Armement fut chargée de met
pendant la période 1939-1940. pour débarrasser leur pays du joug de l’op tre tout en œuvre pour assurer la reprise
Une commission ennemie s’installa à la presseur, le morne rt venu, les ouvriers rapide des fabrications interrompues, en
M.A.S. en 1942, pour la diriger et la produisirent ces pièces... ce qui concerne, au moins, Ls armes pou
contrôler. Aussitôt, une entente tacite Puis l’épopée commença. Saint-Etienne vant être construites dans un court délai.
s’établit entre la Direction, les cadres et fut libérée le 19 août. L’ardeur et l’intelligence ne firent pas
les ouvriers pour organiser le sabotage sur A ce moment, la situation de la Manu défaut. Sous l’occupation, des prodiges
une vaste échelle. Les pièces du fusil al facture n’était guère favorable. Mais pour avaient été accomplis. Entre mille exem
lemand K 3 furent particulièrement visées. tous les travailleurs de Saint-Etienne, ples, il faut signaler qu’à Saint-Etienne
Une lettre de Berlin, émanant du Con c’était une question d’honneur d’assurer 2.000 tonnes de blindage avaient été ca
trôle Industriel de la « Grande Europe » une reprise rapide de la production. mouflées, malgré la surveillance des Bo
protesta avec véhémence contre « l’inertie Fournir des armes est tout autre chose ches et qu’à Gravanches, grâce au magni
et les négligences qui étaient à la base de que procéder à une livraison d’ordre com fique courage du directeur et de cinq hom
la mauvaise fabrication ». mercial. Tous le comprirent. Et pourtant, mes — pour lesquels des citations ont été
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