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C'est  la  méfiance  à  l'égard  du  peuple  de  France  qui  a
           poussé  le  B.C.R.A.  et  la  B.B.C.  à  s'opposer  par  tous  les
           moyens à l'action directe contre l'occupant.  Ils  appréhendaient
           par-dessus  tout  que  se  développe  l'initiative  des  patriotes
           français,  parce  qu'elle  aurait  balayé  avec  les  Allemands  les
           hommes  des  trusts  anti-nationaux,  si  bien  représentés  en
           Algérie  et  à  Londres.
              Mais,  malgré  les  appels  quotidiens  à  la  passivité,  les
           F.T.P.  ont  réussi  à  entraîner  les  Français  à  l'action.
              A  partir  de  1943,  on  peut  dire  qu'ils  impriment  son
           caractère  à  l'ensemble  de  la  résistance  militaire.  Les  corps
           francs  de  l'A.S.,  les  groupes Veni,  O.C.M.,  etc ...  imitant  leurs
           méthodes.  Dans  toutes  les  organisations  patriotiques,  on
           comprend  de  plus  en  plus  la  nécessité  et  l'efficacité  de  la
           guerilla.  Bientôt des  E.M.  et des  F.F.I.  seront constitués  pour
           coordonner  l'action  des  divers  mouvements.
              L'ondres  sent  qu'elle  perd  le  contrôle  de  la  Résistance.
           Une  inquiétude  plane  sur  les  cercles  de  politiciens  liés  aux
           trusts:  qu'adviendrait-il  de  leurs  privilèges  si,  à  1 'instar  des
           Yougoslaves,  les  Français  réussissaient  à  se  libérer  eux-mê-
           mes,  se  débarrassant  à  la  fois  de  l'oppression  nazie,  et  de
           l'oppression  séculaire  des  hobereaux  de  la  finance  et  de  l'in-
           dustrie ?  II  faut  à  tout  prix  créer  des  abcès  de  fixation  de
           cette  maladie  qui  est  l'extension  de  la  guerilla.  II  faut  à  tout
           prix  inventer  des  diversions.  Puisque  les  jeunes  Français
           sont  tellement  enthousiastes,  on  fera  miroiter  à  leurs  yeux
           l'héroïsme  des  combats  sans  issue,  puisque  les  difficultés  ne
           les  rebutent  pas,  on  les  lancera  à  l'assaut  d'obstacles  insur-
           montables.
              Puisque  des  « techniciens »  aveugles  aux  réalités  gardent
           le  culte  de  leurs  doctrines  scolaires,  on  leur  parlera  « d'éco-
           nomie  et  concentration  des  forces »,  de  « réduit»,  et  d' « ar-
           senal ».
              Qu'importe  la  mort  de  centaines  de  fils  de  France,  s'il
           faut  payer  de  ce  prix  le  calme,  la  prudence,  la  passivité  de
           la  population  française  qu'on  espérait  voir  démoralisée  par
           un  déchaînement  de  besti;1lité  nazie.

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